M’enfin

M'enfin - Trek entre Kerlingarfjöll et Dreki

Focus Rando :M’enfin

Ce matin, on remet les choses à l’endroit. Réveil vers 8h00. 6°C dans ma chambre salle de bain.

En guise de p’tit déj, je mange mon risotto de boeuf abandonné hier soir. Froid, c’est succulent. J’ai bien récupéré cette nuit. Je ne sens plus la fatigue de hier soir. Tout a l’air d’aller pour le mieux. Je sens que la bonne humeur est en train de revenir.

 

Le plein d’eau dans le petit torrent d’à côté et en route en milieu de matinée. Mon étape du jour n’est pas très longue. Environ une quinzaine de kilomètres mais ce seront mes premiers pas dans les marais du Þjorsarver. J’espère que le sol ne sera pas trop spongieux. Evidemment, pour le découvrir, il faut marcher dessus. Pour marcher dessus, il faut aller dans la bonne direction.

Je prends trop au nord, trop en direction du glacier. Je comprends très vite mon erreur et parviens sans difficultés aucunes à redescendre dans la plaine et ses petits torrents issus du glacier. D’abord je marche sur du sable et des galets et après un premier gué facile (niveau 1: trouble-mi mollets-peu de courant), je m’attaque aux premières zones marécageuses. C’est facile. Comme sur la neige hier soir, mais ce matin un bon peps. J’avance assez vite observant les oies qui décollent à mon approche. Le paysage est assez particulier. Je n’ai jamais vu de zones pareilles en Islande. Comment dire? Toundra? Permafrost? C’est très agréable et curieusement pas de mouches malgré la présence d’eau stagnante.

Je me régale aujourd’hui. Le sac commence à moins me peser et mes jambes solides. Je me régale jusqu’au refuge de Nautalda que j’atteinds vers 16h00. Refuge est bien le mot. Je découvre qu’une piste vient jusque là. L’édifice est minuscule. Le vestibule habituel avec coin cuisine intégré (une planche pour poser les casseroles) et derrière un dortoir de 8 places dont les lits sont sans matelas. Juste des planches en guise de sommier. C’est rustique. Ca commence à me plaire singulièrement. Je m’éloigne, je m’éloigne… Bientôt je vais être vraiment bien. Mes soucis des premiers jours commencent à disparaître.

Je me régale parce qu’il est 16h00. Et à 16h00, c’est l’heure du muesli que je n’ai pas mangé ce matin. Ca coince. Limite du renvoi. Je me force, c’est plein de bonnes choses (et de farine). Ma bouillie avalée, je refais le plein d’eau au niveau de la petite source en contrebas et repars vers l’est en longeant la nouvelle piste découverte.

Le vent de face se renforce. Les nuages s’épaississent. Et enfin ma première grosse pluie islandaise. Un bon gros déluge de deux heures pendant lequel je dois traverser un gué. Les gués m’ont amusé jusqu’à maintenant. Là trempé, c’est moins cool. Rouler le pantalon, le surpantalon de pluie. Le temps de se sécher derrière. Pas très confortable. Bizarre, il est 18h00 et on a l’impression qu’il va faire nuit sous ce mauvais temps. La piste perdue dans le dédale des marais, mais je m’en fiche, je sais précisément où je vais ce soir. La source chaude d’Olafslaug.

 

Un peu avant d’arriver, j’aperçois au loin 4 quads qui me repèrent aussi et font le crochet pour me rejoindre. Je n’ai plus envie de parler maintenant, besoin d’être seul. 4 islandais bien sûr. Ils parlent mal anglais, je les trouve assez peu sympathiques, chose rare dans ces rencontres en des endroits improbables. Me demandent d’où je viens. Quand je leur dis Kerlingarfjöll, ils se regardent d’un air entendu: Celui là, il est pas net. Et où je vais. A la source chaude. Me repondent qu’il y a pas de source par ici.

Donc…a/ on m’aurait menti…b/ ils sont ignorants…c/ ils ont pas compris (ou moi)…d/…c’est des connards

Je choisi b. C’est mon dernier mot, Jean Pierre.

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Ce qui m’inquiète, c’est que dès que je vois un islandais, il réagit toujours pareil à mon projet. Je fais un truc incensé. Alors que je n’ai pas l’impression de me lancer dans la grande aventure.

On fera le point à Dreki, si je passe le glacier et les gros gués des deux prochains jours.

 

Je continue donc à avancer. La pluie redouble mais à travers le rideau d’eau je commence à voir quelques fumées au dessus de petits torrents. Je ne suis plus très loin du but. Pas envie de jouer maintenant au gentil petit découvreur. J’ai les coordonnées de la source dans mon gps (merci Dieter). Entre la source à 50m et moi, il y a un bon gros torrent. On est le soir. Il pleut fort. Tous les ingrédients pour faire gonfler le niveau. Le courant est particulièrement virulent, mais pas très profond. Juste les genoux (niveau 2 (mon echelle s’enrichit)).

L’endroit est tout bonnement sublime. La source au pied du glacier, un brin de verdure pour planter la tente. Une bonne grosse fumée sort de la source. L’un des endroits de bivouac les plus beaux que j’ai rencontrés. D’abord la tente sous le déluge. Je me mets à l’abri, sèche un peu, prends pour mon temps pour aller au contact de l’eau dans les meilleures dispositions possibles. L’endroit est trop génial pour le galvauder.

22h00, à poil, je sors de la tente pour aller faire trempette. Heureusement que je ne rentre pas en bombe dans l’eau. Elle est bouillante. Il est impossible de ne tremper ne serait ce qu’un orteil.

M’enfin…

Mais pas à court d’idées. Le bassin est alimenté par courant d’eau très très chaude. Si je détourne le courant, c’est comme si je fermais le robinet d’eau chaude de cette baignoire destinée à la baignade des trolls du coin. Donc acte. Je bâtis mon Karanjuhkar à moi. Satisfait de mon labeur, retour sous la tente. Bon repas. Cari de thon à l’antillaise et mousse au chocolat (le poisson passe vraiment bien en lyophilisé).

2h00 du mat. Je peux pas dormir, je pense trop à cette source extraordinaire juste à côté. Donc, second attempt sous pluie et gros vent. Pareil.

M’enfin…

Où est le robinet d’eau froide?

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