Moi, le désert, ça me fait peur…

moi, le désert, ça me fait peur (averell dalton)---il est plus désert, imbécile, puisqu'on y'est (jack dalton) - Trek entre Kerlingarfjöll et Dreki

Focus Rando :Moi, le désert, ça me fait peur…

Réveil, quand je me réveille. Pas pensé à regarder l’heure. Je sais qu’une drôle de journée m’attend. Elle sera longue et dure (euh, peut prêter à confusion, désolé, mais je n’efface pas une première inspiration d’écriture).

Le désert, le désert et encore le désert. Autour des cailloux, le sable.

 

Décision première aujourd’hui: je ne suivrai pas la piste. Piste un bien grand mot. Deux vagues sillons dans le sable suivant des jalons jaunes espacés de 200 ou 300 mètres. C’est suffisamment monotone pour rajouter la marche sur une piste. Nyidalur est vraiment un choix par défaut, même si c’est celui de la raison. C’est le gros refuge de la piste du Sprengisandur. Devoir marcher huit heures aujourd’hui pour tomber sur une horde de types venus en 4*4 surgonflés ou en bus en train de s’enquiller des bibines dans les salles communes du refuge ne me motive absolument pas.

Je suis sur une piste transversale à la principale, donc très peu usitée. Je crois même qu’elle n’est pas encore ouverte, sans doute à cause des barrières de dégel. Au moins je ne respirerai pas la poussière au passage des 4*4 comme ça a pu m’arriver sur la piste de Kerlingarfjöll. Mon choco-pops et en route vers le refuge au pied du Tungnafellsjökull.

Comme je me le suis promis, je ne suis pas la piste. Il m’arrive de la croiser. Un coup à gauche, un coup à droite. Je ne sais pas qui de nous deux va le plus droit. Ce qui est sûr, c’est qu’il faut éviter les combes et passer loin des névés résiduels. Le sable y’est extrêmement mou. On peut y’enfoncer entièrement sa chaussure.

Silence absolu quand je m’arrête. Rien, même pas un oiseau ou un insecte pour perturber ces instants. Je découvre même que je suis capable de mesurer mon pouls au bruit de mon coeur dans mes tympans.

Les vues sur le Hofsjökull derrière moi et le trajet parcouru jusqu’à maintenant sont très belles, mais je n’ai vraiment pas l’impression de beaucoup m’en éloigner, ce que confirme le panorama devant moi. Nyidalur semble toujours aussi loin, tel un décor de cinéma planté devant. Les distances en Islande me paraissent toujours aussi trompeuses. 1km en parait souvent deux. Et ici où l’on n’a plus aucun point de repère, ce n’en est que plus vrai. Le vent bien sûr est maintenant très fort, toujours dans la figure. Il se lève toujours vers midi. Je ne marcherai plus jamais dans ce sens dans ce pays.

Le ciel est particulièrement menaçant. Dire que j’ai pensé l’espace de dix minutes me mettre en short. Nous sommes en début d’après-midi. J’observe avec attention les nuages dans le ciel. C’est particulièrement bizarre. Je les vois grossir, noircir au nord. Des rideaux de pluie brouiller le paysage quelques dizaines de mètres devant moi. Puis ils passent au-dessus de ma tête sans rien déverser. Je me dis que c’est bon, qu’ils sont passés. Je les vois de nouveau au sud qui grossissent, qui noircissent et les rideaux de pluie brouiller le paysage quelques dizaines de mètres derrière moi. Je me dis que c’est bon mais par un étrange phénomène, ils repartent en arrière, me repassent par dessus la tête sans me mouiller, se redéchirent au nord puis re au sud et ainsi de suite pendant des heures.

L’impression que les vents jouent au ping pong et que je suis le filet.

Let… trois gouttes

Il fait par contre vraiment froid maintenant et je me suis équipé en prévision de la pluie.

Filet… le déluge

A cinq km de Nyidalur, pas de bol, j’ai failli m’en sortir indemne. Au loin, j’aperçois la "grande" route avec un 4*4 qui roule à fond dessus. Vais faire du stop sur la piste (que de contradictions en moi).

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J’arrive sur la grosse piste. Y’a pas tant de monde que ça. Le véhicule que j’ai aperçu est sans doute le seul à être passé aujourd’hui, au vu des traces sur le sol. Oublions le stop.

J’en ai marre de cette journée. C’est aussi long que je l’avais pensé. Pas si dur que ça (ouf, sauvé des esprits tordus). Bien sûr il y a cette saleté de gué à 1km de l’arrivée sous le déluge. Eau limpide, Pas plus haut que les mollets; une flaque en comparaison des derniers que j’ai croisés, mais où un gros névé trempe encore. c’est dire la fraicheur de l’onde.

Ce qui est pénible, c’est la pluie. Les gués sous la pluie, c’est vraiment pas cool. Détail: en sortant de l’eau, je mets un grand coup de pied dans un caillou qui sort du sable, le seul à 12km à la ronde. Le pied cassé de l’automne dernier. J’en ai les dents qui claquent et les oreilles qui sifflent. Heureusement que mes chaussures d’eau ont le bout fermé, sinon, je pouvais appeler SOS médecins. Comme quoi, l’équipement adéquat, et bien, c’est bien…

Nyidalur. Surprise. Nobody. Même pas un gardien. Pas un véhicule. Trois ou quatre bâtiments au toit rouge. C’est la très très bonne surprise. Super beau et personne. Tout est ouvert. A part les toilettes, juste accès à la cabane au fond du jardin pour ça, comme d’habitude dans les refuges islandais. Je me lance à la découverte de toutes les batisses. Par endroit, les volets ont souffert de l’hiver et sont partiellement dégondés. Ils grincent sinistrement dans le vent et claquent contre les murs en bois. L’un d’eux tape sur une vitre. L’impression d’arriver sur terre après la disparition de toute forme de vie. L’archéologue découvrant les restes d’une ancienne civilisation disparue. Disparue, mais brutalement. Tout est impeccablement rangé, propre. Encore de la nourriture de ci de là.

Je suis Jack Nicholson explorant son hôtel isolé dans "shining". La cuve à mazout, le groupe électrogène, les cuisines, les dortoirs, la loge de la gardienne, la remise. La caisse enregistreuse est toujours en place. Toutes les clés des bâtiments fermés disponibles. L’impression que tout le monde est parti en courant. Bien sûr, il fait pas très chaud. D’après mon thermomètre, seulement 8°C dans la pièce que j’ai adoptée.

Mon duvet à l’étage, sous les rayons de soleil qui transpercent en cette fin d’après midi. En bas dans la salle commune, la popotte et notamment en train de me préparer pour me réchauffer un thé aromatisé à la pêche instantané trouvé dans les réserves de la cuisine. Ca sent le tang. Hmmm!!! et ça a le goût du tang! Et bien, c’est super bon.

Maintenant, occupons nous de ces sachets de muesli farinés qui n’ont pour autre fonction que de m’alourdir le sac à dos (400g par jour*13). Je les mets sur un banc à la vue de tout le monde qui pourrait venir dans les prochains jours; la piste ne devrait pas tarder à ouvrir (je pense que le 4*4 de tout à l’heure était hors la loi). Et je commence à écrire un mot disant que les sachets ont été conditionnés le 19/06/08 et que je les laisse à disposition du premier qui en voudra, à moins que beaucoup de temps se passe jusqu’à leur découverte et qu’on les jette alors à la poubelle. Le tout en anglais.

Je réfléchis à la tournure de mes phrases quand tout à coup j’entends du bruit dehors. Les fantomes se manifesteraient plus vite ici qu’avec Jack Nicholson. Deux espèces de trolls avec des chapeaux de pluie pointus et une énorme bosse dans le dos sous leur cape sont en train de lutter avec un des volets récalcitrants. Un rouge et un bleu. Ils sont détrempés

Jugement précipité. Ce sont des hommes. Un homme et une femme plus précisément. Il s’avère qu’ils sont français et qu’ils viennent de Myvatn. Ils marchent depuis neuf jours. Je les invite chaleureusement dans ma tannière. Ils ont fait les bourrins, à cause de la pluie et de la fatigue et ont traversé le dernier gué sans changer de pompes. Tout mouillés maintenant. Va falloir sécher ça. Leur offre aussi mon thé à la pêche. Ils ont 20 ans. Ils ne connaissent pas le tang. Ptain!!! La déchéance de notre civilisation. Nos jeunes générations ont perdu le culte des bonnes choses. un des produits piliers de ma jeunesse a disparu. Ma jeunesse vacille. Je me rends compte à l’instant que je n’appartiens plus au même monde qu’eux, que j’ai basculé de l’autre côté. Je me moquais de mon grand père qui faisait chabrot. Ils se moquent de moi qui buvait du jus d’orange en poudre sans oranges.

Par contre, ils aiment le muesli que je leur ai cédé, m’enlevant l’écharde du pied quant à ma grammaire anglaise. Curieux comme un truc qui vous débecte peut plaire à ce point à un autre. Ils m’ont avoué qu’ils étaient morts de faim. Mais quand même, lui m’en mange trois sachets à la suite, directement à la petite cuillère sans même les réhydrater. On dirait qu’il mange du foie gras.

Eux dormiront ce soir en bas, moi en haut. Nyidalur est l’endroit du monde qui compte la plus forte représentation de français (100% de la population). C’est un peu dommage, non, de se retrouver entre français alors que dans ce bout du monde, ce serait si amusant d’échanger des cultures différentes? Sur ces considérations métaphysiques, je vais de ce pas les mettre en application et m’imbiber de culture islandaise en dévorant F. Vargas.

Bonne nuit.

Demain, journée de repos et petite reco en altitude.

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