Réveil quand les yeux s’ouvrent.
Dehors la pluie est déchainée. C’est cool le confort d’un toit quand même.
Passerai je une journée de plus dans ce doux refuge en attendant que la pluie cesse?
Mais oui, mec, les jours de sécurité, ça sert à attendre que la pluie cesse en Islande. T’as prévu combien de mois de vacances?
Gardons les plutôt pour les derniers jours au cas où, même si je suis maintenant en avance sur le programme.
Et puis t’es pas en sucre, tu vas pas fondre. Si ça avait été le cas, y’a bien longtemps que tu serais dissout après les premiers jours.
Oui mais, c’est quand même bien sympa de rester au chaud dans son duvet sur un bon matelas et de prendre son mega p’tit déj assis sur une chaise.
Donc, je tafiolise. J’ai du mal à m’extirper de cette cabane pour affronter de nouveau la pluie. Vers 10h00, j’arrive enfin à me faire violence (aïe, tu me fais mal ,maitresse) et c’est reparti.
La pluie s’arrête moins de cinq minutes après le départ. Une petite heure et le champ de lave cède la place enfin aux premiers cratères du Lakagigar.
Spécial… J’adore… Balance le sac au mileu de la piste et part faire le couillon dans les mini-cratères.
Le sixième sens… Le sac est au milieu de la piste. Me dis que depuis hier, j’ai vu personne passer mais qu’aujourd’hui, maintenant que le sac est au milieu, dans un virage sans visibilité, un 4*4 va arriver.
Je me hâte pour le reprendre, je sais pas pourquoi.
Deux minutes après arrive un 4*4 du parc du laki avec un ranger à son bord. Trop fort le mec.
Bla bla bla…
Il veut m’avancer, me faire gagner quelques km.
Ah non, shame on me si je monte dans une caisse… c’est pas loyal… à pieds ou mourir… On discute un peu de mes projets, notamment de mon envie de longer la skafta. Je sais pas ce qu’elle leur a fait cette rivière, mais là même sans vouloir la traverser, il me dit que c’est très dangereux. Il prend également mon nom au cas où je disparaitrais pour que l’enquête puisse démarrer à la dernière personne qui m’a vu. Et ben… c’est rassurant… Pas des optimistes les gars du coin.
Croisement de la piste Blagil (coucou Daniel et Rachel) – Hrossatungur et je commence sur la très grosse piste du Laki. Au bout de 15 minutes, sur pas de l’asphalte mais c’est tout comme, je commence à regretter la proposition du type tout à l’heure. Ici, c’est pas pour les piétons. Au fonc j’aperçois un sommet caractéristique, Hnuta, qui est le dernier point vraiment significatif de l’alignement du Lakagigar vers le sud ouest. C’est loin, pfff, et je ne dois quitter la piste qu’une fois à la pointe nord est, de l’autre côté. J’en ai particulièrement marre des grosses pistes que je dois suivre depuis Holaskjol. Ca fait trois jours maintenant.
Et voilà mon ranger qui revient comme par miracle et qui insiste encore une fois pour me faire gagner quelques kilomètres. Là je me fais pas prier.
C’est alors que commence un passage fabuleux que l’on franchit à fond. Des cratères moussus de partout. Du noir, du rouge. Magique. Mais je suis en bagnole… Et m…!!! Va moins vite s’il te plait… Laisse moins descendre…
Mais non, c’est pas là qu’il faut que je te dépose, c’est plus loin.
Je crois que je vais pleurer… Libérez moi de ce mad max… Il a pas compris le plaisir que j’éprouve à découvrir au rythme lent de mes pas. Il pense qu’il me rend un énorme service (ce qui dans l’absolu est parfaitement vrai). Je suis en train de manquer la plus belle partie depuis le début de mon voyage. Je ne peux pas m’empêcher de lui en vouloir. M’apprendra à être fainéant et pas loyal.
Il me fait passer aussi un gué assez profond au milieu de la faille. Même pas content, ça tue tellement c’est beau. La rivière est la résurgence des infiltrations de l’eau dans le champ de lave, m’explique t’il.
Olivier, j’avoue que j’ai pas du tout affronté la nature à la loyale cette année. Le décompte de mes disgressions: 4 ponts, 2 gués en 4*4, la piste sur 50km pour échapper aux champs de lave et la nuit dans 2 refuges. J’ai perdu le titre de super aventurier que je m’étais auto-proclamé.
La Skafta m’apparaît de nouveau au loin. Mec, là, faut que tu t’arrêtes parce que le Laki, bon, on s’en fout un peu sur les bords mais la Skafta, c’est pas possible, faut que je rentre en osmose avec elle (en anglais, c’est pas simple).
Oh putain (désolé ça m’a échappé), j’aperçois la cascade en dessous d’Uxatindar.
T’inquiète pas, man, je te dépose exactement là où il faut.
J’ai l’impression de faire encore des km dans ce décor de rêve et la cascade qui est en train de disparaitre derrière moi. Au secours, ceci est un enlèvement.
Et brutalement, il s’arrête sans que je lui dise rien. Voilà, c’est là. et il me dit une dernière fois: ne longez pas la skafta sous le Kambar, c’est dangereux. "It’s very closed".
Grmmmblll, takk, grmmmblll, féryr, grrmmmblll (traduction: grmmmblll, merci, grmmmmbllll, beaucoup, grmmmbllll) grommelé-je.
Et puis ça veut dire quoi it’s very closed quand on parle danger en montagne?
Maintenant, avec le recul, j’avoue que je lui dois un grand merci pour le bout de chemin. La journée ne commence effectivement que maintenant. Il m’a fait gagner au moins trois heures de marche et je vais en profiter pour voir the ULTIMATE VIEW (mais je ne le sais pas encore). Je galère une petite heure à traverser des petits affluents dont le fond est très argileux (ce qui nouveau par rapport à ce que j’ai pu connaitre jusqu’ici), chaque chaussure pesant alors deux kg de plus. L’accès est pas cool. A l’arrivée au bord de la rivière, p’tit déj et je crois les plus beaux paysages que j’ai jamais vus.
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L’approche…effectivement, il faut aller bien loin sur la piste du Laki pour ne pas être géné par la grosse rivière d’Ulfarsdalur. A pied, j’aurais sans doute coupé plus droit et je me serais mis dans une belle misère pour traverser.
En rouge, la ligne de crête des Kambagigar.
Cette rivière, la Skafta sous Uxatindar, …, les photos, no words
Ensuite, je remonte lentement vers les kambagigar. Je l’écoute ou je l’écoute pas le gars?
A gauche ou à droite du rouge? Au bord de l’eau c’est quand même génial.
C’est maintenant qu’il faut que je prenne une décision.
Ca a l’air accessible dans les deux sens. Je sais pas. Mais bon, si j’écoute la sagesse du type, je gagne en plus un peu de temps en coupant plus droit au milieu de rien mais je risque de passer à côté de passages extraordinaires.
Encore quelques minutes de réflexions.
Sur la plage qu’on aperçoit sur la photo précédente, un étroit passage qui remonte le ravin. Ca m’a l’air rigolo.
Donc j’opte pour le passage intérieur. Ciao, la Skafta, on se revoit demain.
Cette passe m’évoque le "Dimholt" du Seigneur des Anneaux (le passage sous la montagne).
Les trolls surveillent le passage.
Alea jacta est.
Le désert noir comme jamais alors que quelques mètres avant, je marchais dans les mousses vertes pluorescentes.
Bon, mais je sais pas trop où ce choix impulsif et non réfléchi va m’amener. Je remonte dans le lit de ravins successifs vers un petit col. Mes yeux ont du mal à mettre au point entre devant et derrière.
Devant
Derrière
Assez rapidement, j’arrive à ce fameux petit col, et derrière apparait au loin le lac Kambavatn (et enfin le Vatnajökull m’apparait en toile de fond, bientôt il sera au centre du sujet) qui ne parait pas barré par un obstacle majeur. C’est là que j’ai prévu de monter le camp ce soir. Une fois le camp dressé, je grimperai un peu sur les crêtes pour voir un peu ce qu’il y’a de l’autre côté.
Mais là, à ce col, nouvelle impulsion subite. Je suis en état de transe. A la limite des larmes. Tout autour de moi, on est à la limite de l’irréel. J’ai tendance à employer des superlatifs peut être un peu trop souvent. Donc, vous allez croire que je m’emballe pour un bidule de plus.
Là non, on y’est. C’est là qu’il faut être.
on y’est presque, faut monter encore un peu.
Et…
Voyez plutôt (je ne suis pas capable de sélectionner)
Celle là, on voit les deux pilones du cable transbordeur que j’avais envisagé d’utiliser pour traverser la rivière en tyrolienne.
C’est reparti (avec un peu de narcicisme)
La Skafta en gros plan (à 10-15 km) là où j’envisageais de tenter le gué
Et enfin le côté aride du Laki par où je suis monté.
Mon voyage peut s’arrêter ce soir. Je suis saturé d’émotions après ces quelques heures. Plus besoin d’en voir davantage.
Mélange curieux de bonheur et de tristesse en marchant maintenant vers le campement. Faut dire aussi que c’est moins exaltant. Et je suis en panne d’eau. Pourvu que l’eau de Kambavatn soit potable.
pfff…!!! Même ça ne m’émeut plus. Je veux arriver. Mais avant d’arriver… et je suis en panne d’eau.
Yes, yes, yes
Après avoir fait baisser le niveau de 20 cm pour étancher ma soif et rempli ma gourde avec une très bonne eau claire (faut bien écarter quelques moucherons crétins qui se sont noyés et que le vent pousse forcément vers moi), je décide que j’ai pas envie de dormir ici, mais plutôt au lac suivant, à Lambavatn pour m’approcher un peu plus du centre névralgique du Laki. A l’azimuth, je pars tout droit (presque, faut quand même contourner le lac) en espérant que je me trompe pas de vallon. Un peu fatigué quand même.
Trop fort. Je vois la piste du Laki juste au-dessus du lac.
18h30, encore un peu de circulation… Le temps de contourner le lac pour aller planter la tente juste sous la piste, je vois trois véhicules passer.
Arrivé à destination, ça me plait pas de planter la tente là.
J’ai demandé ce matin au ranger où j’avais le droit de planter ma tente. Il m’a dit où tu veux sauf dans l’alignament des cratères.
Et si je plantais ma tente dans l’alignement des cratères?
Deux km plus loin, complètement démonté… le bivouac de rêve (surtout que c’est interdit), bien planqué de la piste.
Mais je n’ai pas pensé aux intrusions aériennes.
Même pas trois minutes que la tente est montée, un tout petit avion rouge me passe au-dessus de la tête. et il repasse plusieurs fois. P’tit coup de stress, pensant qu’on s’intéresse à ma petite personne, mais non, c’est certainement un vol touristique au-dessus de l’alignement des cratères.
dans la foulée, un ulm avec une énorme caméra, sans doute Yann Arthus-Bertrand qui refait une prise pour son film. C’est vrai qu’il a peu loupé la séquence. Faut la refaire.
Dans le film "Home", le Laki, c’est au tout début, exactement après 3 minutes et 10 secondes. Amusant, je reconnais exactement l’endroit où je me suis installé,là où le cratère est ouvert en deux (je sens que je vais recevoir des comm insultants pour m’être installé là…)
C’est beau, super beau ce soir, mais je suis un peu hermétique à la beauté du site quand je fais le tour de quelques cratères. Je n’ai pas encore digéré la vue de l’après midi.
Celui là, on devine que c’est un méchant…
et un tout gentil…(sauf que sur son autre face, il est complètement ouvert, déchiré, totalement hostile)
Y’a quelqu’un qui voit ma tente?
Je n’ai plus assez d’eau pour cuisiner et je n’ai pas envie de retourner au lac en chercher, la zone des cratères est totalement aride.
Repas froid donc.
Qu’est ce que j’ai pris dans les yeux… Merci monsieur le ranger pour ton aide… Tout est divin… je ressens un sentiment d’accomplissement absolu, de plénitude… Mais voilà, j’ai l’impression que mon voyage est fini… Que je suis en phase descendante à partir de maintenant… Pas la pêche, je suis triste…
On dit que l’homme est triste après l’amour… C’est vraiment ce que je ressens ce soir…