Après avoir réalisé le Mare e Monti sud et le Mare a Mare sud en 2006, je retourne marcher en Corse. Il est trop tôt pour se lancer sur les sentiers du GR20. Avec Johanne, nous décidons donc de partir sur le Mare è Monti nord entre Calenzana et Cargèse. Un itinéraire de 9 jours sur la côte ouest de la Corse, entre mer et montagne.
En surplomb de la mer, les panoramas s’invitent à nos yeux ébahis : réserve naturelle de Scandola ou golfe de Porto peuvent aussi se visiter en bateau pour compléter les perspectives.
Une grande partie du chemin est intégrée au Parc Naturel Régional de Corse.
Rejoindre Calenzana en bus
12h40. L’avion se pose lourdement sur le tarmac de l’aéroport de Bastia-Poretta. Nous récupérons rapidement les sacs à dos et prenons le bus pour le centre-ville de Bastia à 13h15. Les horaires changent tous les jours. Pour les connaître, se rapprocher de la société des transports Interurbains Bastiais.
Le bus nous dépose à Bastia Préfecture. Celui pour Calvi est sur le même rond-point. Il est dans plus de deux heures. Une pizzeria ira remplir nos estomacs affamés. Autre mission : trouver une cartouche de gaz pour notre brûleur Optimus. Nous ne trouvons rien dans les environs (à notre retour, nous découvrons toutefois le magasin La Randonnée place de l’hôtel de ville qui pourra vous fournir en cartouche de gaz et en matériel de randonnée si vous avez oublié quelque chose). Un ami Facebook m’avait parlé d’un Intersport à l’entrée de Calvi. Je les appelle. Il dispose de cartouches de gaz. Le bus pour Calvi passant devant le magasin de sport, il nous y arrêtera au passage.
Nous rejoignons le centre-ville de Calvi à pied où nous avons décidé de passer la nuit à l’hôtel Belvédère. Au passage, je vous conseille le resto U Casanu dans le boulevard Wilson. C’est assez exigu mais la cuisine est goûteuse.
Le lendemain, découverte de Calvi, sa citadelle, ses ports et ses petites ruelles. Sur www.corsicabus.com, nous avions récupéré les horaires de bus. Par précaution, nous passons à l’office de tourisme recouper les infos. On nous affirme qu’il n’y a pas de bus pour Calenzana avant le 1er juin et nous ressortons avec des contacts de taxi. « Pour être sûr, mieux vaut venir chercher l’information à la source » nous dit-on. Conseil que nous pratiquons de suite en nous rendant finalement au bureau des Autocars les Beaux Voyages qui affrète le bus pour Calenzana. On nous confirme qu’il y a bien le bus scolaire qui peut nous monter à Calenzana, le point de départ du Mare è Monti mais aussi du GR 20. Il est impératif de téléphoner (04 95 65 11 35) pour se faire confirmer les horaires de départ et écouter les informations de l’office de tourisme avec une oreille distraite.
13 € de plus pour rejoindre Calenzana. Presque 1 € du kilomètre. C’est hors de prix et aussi cher que le taxi finalement. Dès trois personnes, le taxi devient moins cher. Une autre solution est de rejoindre Calenzana à pied en partant du sentier équestre qui longe la camp militaire Raffali entre Lumio et Calvi.
Calenzana, village de l’arrière-pays Corse hautement réputé pour être le point de départ du GR 20 et du Mare è Monti, possède quelques églises et chapelles qui méritent une visite. Nos préférés : L’église Sainte-Blaise, bel édifice baroque de la fin du XVIIe siècle et la chapelle Sainte-Restitude sur la route de Zilia à un kilomètre du centre du village. La clef peut être récupérée au tabac à l’angle de la rue Napoléon (pas le tabac face à l’Eglise Blaise).
Nous nous installons à l’hôtel Bel Horizon car le gîte d’étape est fermé pour cause de travaux. Nombreux appartements et villas à louer aussi pour la nuit.
Demain débute la randonnée. Enfin, dirais-je. Car le bus, c’est finalement assez usant…
Calenzana – Bonifatu
+ 584 m / – 315 m 10,6 kmRéveil au clairon (ou presque) par un régiment militaire qui fait tout un foin sur la place de Calenzana. Bon, de toute façon, c’est presque l’heure de se lever. Le ciel est couvert.
Après un petit-déjeuner vite avalé, nous quittons Calenzana à travers les ruelles de la cité par le chemin commun au GR20, au Mare e Monti et au sentier de transhumance. Nous quittons l’embranchement avec le GR 20 pour nous diriger vers Bocca a e Corsu. Belles vues sur Calenzana, Calvi et d’autres villages de Balagne. Le ciel bleu est déjà revenu.
Le vent a chassé les nuages. Nous descendons par le sentier dit du facteur jusqu’à une piste de l’ONF. S’ensuit un long passage plutôt horrible pour les pieds et la tête. C’est vraiment le genre de sentier à faire à VTT ou à cheval mais certainement pas à pied. Ça use les souliers comme dit le dicton et ça nuit au moral aussi.
Toute la matinée, nous parlons de nos petits bobos. Nous sommes partis fatigués et avons déjà mal partout. En randonnée, c’est souvent les premiers jours les plus difficiles. Johanne a un sac qui pèse 13 kilogrammes et le mien dépasse les 14,5 kilogrammes sans compter les 3,5 kilo de matos photo. Les tamalous ont trop parlé. Nous nous promettons d’arrêter de nous plaindre. Nous sommes en Corse et comptons bien en profiter.
Nous atteignons le pont de Figarella en trois heures et nous nous posons pour déjeuner. Nous avons emporté avec nous des plats lyophilisés pour les repas du midi. Le soir, nous mangerons dans les gîtes et refuges qui jalonnent le sentier. L’étape étant courte, nous en profitons pour faire une sieste.
Nous franchissons le pont et remontons la rivière à l’ubac. Entre deux lacets, le panorama sur le cirque de Bonifatu s’ouvre à nous.
Nous atteignons la départementale 251 que nous empruntons par la gauche pendant un petit quart d’heure. Nous sommes arrivés à l’auberge de la Forêt. L’établissement propose des chambres doubles, triples, en dortoir et des emplacements pour bivouac. Corsica cola à la carte. Fondant au chocolat maison succulent.
Peu avant le repas, un randonneur arrive en panique. C’est Samuel alias Ubelgu, membre d’I-Trekkings amoureux fou de la Corse depuis qu’il y a mis les pieds. Nous sympathisons autour d’une lasagne et d’une Pietra, une des bières locales.
Bonifatu – Tuarelli
+ 686 m / – 1132 m 14,5 kmA proximité du pont près de l’auberge, nous empruntons le sentier forestier qui monte vers Bocca di l’Erbaghiolu (1258 m). L’ONF gère les 3013 hectares de la forêt de Bonifatu. Plus de 1100 d’entre eux ont été dévastés par les flammes en 1982. Jamais ailleurs qu’en Corse, l’odeur des pins n’est aussi sèche, la poussière aussi ensoleillée et les montagnes arides comme des déserts.
Le sentier passe à proximité des ruines de la maison du Prince Pierre Bonaparte (1815 m – 1881 m) et grimpe en lacets à travers les pins maritimes et les pins laricio. Fièrement dressés vers le ciel, ils peuvent atteindre 50 mètres de hauteur et plus de deux mètres de diamètre. La qualité du bois est exemplaire. Les romains utilisaient déjà le tronc pour fabriquer les mâts de leurs galères.
Peu avant d’arriver à Bocca di Bonassa (1153 m), la présence des sangliers (espèce Sus scrofa meridionalis) est omniprésente. Partout autour de nous, la terre a été retournée par les marcassins locaux. Chassé, le sanglier est souvent mis en cuisine. On le retrouve dans de nombreux plats traditionnels dont la fameuse daube de sanglier et le civet de sanglier.
Si nous n’avons pas observé la sitelle Corse, un petit passereau ne vivant que dans les forêts de conifères corses étagées entre 800 et 1800 mètres d’altitude, nous avons vu un rouge-gorge, un milan et une fasciée et même entendu un pic Epeiche, rouge ou vert, nous ne le saurons jamais.
A Bocca di Bonassa, nous posons les sacs. Je prends la gourde vide et descend par le sentier du PR pour rejoindre la source. Un léger filet coule. L’eau nous servira pour faire chauffer les plats lyophilisés. La partie montante de la journée est terminée. Il nous reste à descendre vers Tuarelli.
A hauteur d’une portion en forme de Z, nous nous arrêtons pour déjeuner. Tartiflette lyo pour Johanne et haché d’agneau et ses légumes pour moi. Nous décapsulons une bouteille de kriek que nous a remis ce matin Samuel. C’et une bière à base de cerise pour ceux qui ne connaissent pas. La pluie s’invite pendant le repas. Autant dire que nous terminons de manger vite fait bien fait.
Nous marchons en roue libre jusque Tuarelli. La descente semble sans fin. Je regarde de plus près les fleurs que nous croisons. L’hellébore de Corse est partout. C’est une plante toxique qui était autrefois utilisée pour soigner les plaies de bêtes ; les feuilles étaient également utilisées pour envelopper les fromages et conserver leur fraîcheur. Les asphodèles porte-cerises sont aussi très présentes sur le bord du sentier. En Corse, on les appelle des luminellis car leur hampes florales sèches donnent une lumière vive quand elles sont brulées lors des processions.
A l’entrée du gîte (☎/fax 04 95 62 01 75), une Ferrari trône comme un trophée. A l’intérieur, Pierrot Mariani, le propriétaire du gîte, est assis derrière un bureau sur lequel se trouve pas moins de 10 paquets de cigarettes et autant de boîtes de médicaments. Ni pharmacie, ni débitant de tabac à l’horizon pour autant ! Pierrot ne laisse pas les clients indifférents. Certains l’aimeront pour son franc-parler, d’autres le détesteront pour les mêmes raisons. Une adresse qui a du caractère. Autre choix dans les environs : Au pont de Tuarelli, une villa pour 6 personnes.
Sous le gîte, les piscines naturelles de la rivière Fango invitent à la baignade. Hélas en avril, l’eau est si froide qu’elle ferait fuir le moindre norvégien. C’est vous dire !
Tuarelli – Galeria
+ 220 m / – 291 m 11,4 kmNous quittons le gîte à 8h15 pétante et partons sur la rive droite de la rivière Fango. Nous laissons de côté la variante qui permet de rejoindre directement Serriera sans passer par Galeria et Girolata. J’avoue ne pas trop comprendre l’utilité de ce sentier qui zappe deux très belles étapes du Mare è Monti. A moins de réduire l’itinéraire et de réaliser une boucle.
La vallée du Fango, Fangu en Corse, qu’on nomme aussi Filosorma est classé par l’UNESCO depuis le 1er mars 1977 comme réserve de biosphère. On y retrouve une très grande hétérogénéité des paysages en raison de l’étagement de l’altitude. En très peu de kilomètres, on passe du niveau de la mer à 2335 m. La forêt du Fango est la plus vaste forêt de chênes verts d’Europe et donc de Corse.
Pour notre part, nous longeons le fleuve Fango par la rive droite. En amont du Ponte Vecchiu, les gorges sont tout bonnement magnifiques, tout de rose grâce au Porphyre rouge. Un vrai paradis pour la baignade, ce qui n’est pas sans poser de problème sur le plan écologique en pleine saison touristique. Nous traversons la rivière et continuons sur la départementale jusqu’au village du Fango. Là, Samuel nous quitte. Il a quelques affaires à mener auprès de producteurs pour son petit commerce de vente de produits corses en Belgique. Il reprendra le sentier à Galeria dans quelques jours.
A la sortie du village, nous obliquons vers le sud ouest pour emprunter un sentier en balcon de la route. Après quelques lacets, il s’enfonce un peu plus profondément dans le maquis. Belle forêt de genévriers et de chênes verts.
Après une belle montée à découvert, nous passons une ancienne bergerie et continuons notre progression. Un peu plus loin, le paysage s’ouvre sur la vallée du Fango et le golfe de Galéria.
Galéria est enfin en vue. Sa plage, son petit port et sa situation privilégiée face à la méditerranée. Si on se retourne, on constate aussi que le village est blotti au pied du Capu Tondu haut de 839 mètres. Avec ses deux plages, ses structures de plongée sous-marine et la présence toute proche de la réserve naturelle de Scandola, Galéria est une petite station balnéaire appréciée pour son calme, ses possibilités de baignade tant en mer qu’en rivière et ses activités de pleine nature. Nous apprécions la vue plongeante que nous offre le sentier sur le golfe qui entoure la cité corse.
Installation au gîte l’Etape Marine. Si la partie dortoir ressemble fortement à un établissement de collectivités, la salle à manger et l’accueil font vite oublier ce petit défaut. Galeria dispose d’autres possibilités d’hébergements pour tous les budgets : camping, hôtels, auberge et appartements à louer.
Galeria – Girolata
+ 743 m / – 768 m 11,6 kmDe bon humeur, nous décollons du gîte vers 8h20 après un petit-déjeuner copieux ; les précédents étaient un peu chiches pour des randonneurs. Le début du sentier longe la petite route qui rejoint le hameau de Calca.
Le chemin oblique vers le sud ouest et s’enfonce dans le maquis. Il rejoint la retenue d’eau du Tavulaghiu et s’élève un peu plus dans une zone boisée abondante et humide. Les moustiques sont légions et attendent les randonneurs patiemment. Nous remontons le lit de la rivière, tantôt sur une rive, tantôt sur l’autre.
Nous remontons le ravin de Luccio. La pente s’accentue. La végétation change. Chêne vert et bruyère deviennent omniprésent. Le paysage s’ouvre ; les vues sur le golfe de Galéria sont magnifiques.
Petite pause sur un promontoire rocheux avant d’atteindre la crête de Luccio puis la punta di a Liternicccia (778 m). Splendide panorama sur Girolata, notre point de chute de ce soir et le cap Senino à l’extrémité nord du golfe de Porto.
Nous continuons sur la crête. Les vues sur le golfe de Galeria, la baie de Focolara et le golfe de Girolata invitent à se poser. Il est 12h30. Nous en profitons pour faire la pause déjeuner. Un arrêt d’une petite heure que nous aurions aimé prolonger sans les nuages menaçants qui arrivent du centre de l’île. Ah, si j’avais eu une tente…
La crête s’abaisse doucement jusqu’à Bocca di Fuata. De là, un sentier descend plein sud vers Girolata. Ce petit hameau, accessible uniquement à pied ou en bateau, est réputé pour sa rade et son cadre paradisiaque. Avec ses eucalyptus, sa tour génoise, sa baie aux eaux turquoises et ses montagnes environnantes, Girolata est un lieu de tranquilité idéal… sauf l´été où les touristes s´y bousculent. Petit regret : sa tour génoise si photogénique ne se visite pas.
Nous nous installons à la cabane du Berger (☎ 04 95 20 16 98) idéalement placée sur la plage. Un restaurant de qualité dans un cadre féérique précise la carte de visite de l’établissement. Une affirmation que nous ne démentons pas. Voilà un patron heureux. Qui ne le saurait pas ici ?
L’établissement, souvent complet en saison, est presque vide à la mi-avril. 38 places en dortoirs et 3 chambres pour les personnes qui recherchent un peu d’intimité ou qui en ont marre de se taper les mêmes ronfleurs depuis Calenzana.
Girolata – Serriera
+ 1187 m / – 1122 m 15,2 kmDépart un peu plus matinal que d’habitude en raison de la longueur de l’étape qui nous attend. Nous doublons en effet deux journées de marche. Le topo-guide de la FFRandonnée annonce 9h00 de marche. Nous espérons en faire un peu moins.
Pour démarrer du bon pied, nous empruntons le sentier du facteur. Jusqu’à peu, Guy, le petit bonhomme bleu et jaune, partait six jours sur sept de Partinello jusqu’à Girolata pour distribuer le courrier. La factrice actuelle rejoint Girolata en bateau pour délivrer les bonnes et les moins bonnes nouvelles. Les temps changent…
Le matin, le sentier offre de très jolies panoramas sur Girolata et sa tour génoise. Nous rejoignons la plage Cala di Tuara et retrouvons l’itinéraire classique du Tra Mare a Monte. Le chemin monte à couvert jusqu’à Bocca a croce où de nombreux randonneurs à la journée garent leur véhicule pour se rendre à Girolata.
Nous empruntons le chemin face à la route en direction des pylones. Le sentier se met à grimper sérieusement. Belle vue sur le village d’Osani et le Cap Senino qui sépare le golfe de Porto de celui de Girolata. Pas d’arbre pour se protéger du soleil.
A Capu di Linu, nous mangeons une barre de céréales. Il fait de plus en plus chaud. Le soleil est écrasant. Nous continuons en direction du Capu di Curzu et bifurquons un peu avant vers le sud pour descendre au village de Curzu.
Nous l’atteignons en 4h30 où le topo-guide de la FFRandonnée préconise de s’arrêter. Nous pensions faire le plein d’eau un peu avant le village mais le ruisseau était à sec. Nous décidons donc d’aller frapper chez des gens du village. Il nous faut un peu descendre car les premières maisons ont porte et volets clos. Sans doute des résidences secondaires. Une dame nous autorise à remplir nos gourdes au robinet de son jardin. Nous reprenons le sentier et nous arrêtons un peu plus loin sur un petit coin d’herbe pour manger nos plats lyophilisés. Nous ne nous autorisons pas de sieste car il reste plus de trois heures à marcher.
Le chemin descend sous le Capu a Parata jusqu’au ruisseau de Verticella presque à sec. Nous prenons à gauche le sentier qui monte en direction du Capu d’Orca. Nous laissons de côté la variante du Mare è Monti venant de Tuarelli et prenons le sentier qui descend plein sud jusqu’à Serriera. Avant de nous installer au gîte l’alivi, petit passage par l’épicerie où nous craquons pour un kit-kat.
Aujourd’hui, nous avons eu chaud, très chaud même. La majorité de l’itinéraire se réalise à découvert. Coup et avant-bras sont bien marqués comme un souvenir de Corse qu’on emporte avec soi.
Serriera – Ota
+ 934 m / – 657 m 9,4 kmOn traîne un peu avant de démarrer la randonnée. Je ne sais pas si c’est la longue journée d’hier ou le nutella du petit-déjeuner qui nous incite à démarrer un poil tardivement.
Le sentier traverse le ruisseau de Santa Maria et remonte la route forestière de Lonca sur deux kilomètres. On croise un chenil au passage. On a beau savoir qu’ils sont en cage, les aboiements de tous ces chiens de chasse nous font dresser les poils. Nous restons sur nos gardes au cas où un molosse viendrait à quitter sa cage. Nous passons sans encombre.
Le chemin quitte la piste forestière et monte plein sud à travers la forêt de Sabinetu. C’est raide, parfois très raide. Johanne en bave. Heureusement que c’est à l’ombre. Nous atteignons les 930 mètres de la crête en 2h50.
Nous poursuivons sous la pinède et à hauteur de la châtaigneraie, nous nous rendons au sommet du Pedua pour déjeuner. Nous profitons de la vue sur le golfe de Porto tout en cassant la croûte (façon de parler car pour des plats lyos, il n’y a pas beaucoup de croustillant).
Délimité au nord par la Punta â Scopa (Osani) et au sud par le Capu Rossu (Piana), le golfe de Porto est constitué de roches volcaniques. Le golfe ainsi que les calanches de Piana, le golfe de Girolata et la réserve naturelle de Scandola plus au nord, sont inscrits depuis 1983 sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco.
Avant de nous engager dans le ravin de Vittrone, nous croisons deux régiments militaires en exercice. Le secteur est également fréquenté par les chasseurs. Si nous n’en voyons pas, de nombreuses cartouches gisent sur le sol.
Aujourd’hui comme les jours précédents, nous délogeons les lézards des murailles en marchant. Ils possèdent des couleurs très variables. Les femelles sont généralement lignées et les mâles plutôt réticulés. Aujourd’hui, nous dérangeons également deux couleuvres à la robe sombre striée de jaune. C’est une espèce commune en Corse qui se nourrit de lézards, de petits mammifères, d’oiseaux et de serpents juvéniles. Elle apprécie les pierriers, friches, cultures et zones pâturées. Une bonne partie de la Corse en quelque sorte…
A la sortie du ravin, Johanne n’en peut plus. La journée d’hier l’a fait puiser dans ses réserves. Son pas est haché et elle souffle comme un bœuf. Elle finira la journée sur les rotules. Il est vrai que le sentier en balcon qui contourne le Capu d’Ota nous a semblé interminable sur la fin.
Ota est un charmant village de 550 habitants qui s’étend au milieu des terrasses plantées d’oliviers. La vie du village tourne autour de l’Eglise, de l’épicerie et des deux gîtes d’étape/restaurants.
Installation au gîte chez Marie. Dans le bistrot, les Corses (dont de nombreux chasseurs) y viennent en fin de journée. Ça tchatche fort, corse, ça refait la Corse et c’est plutôt rigolo à voir et à entendre même si on se sent un peu mis à l’écart.
Ota – Marignana
+ 713 m / – 351 m 10,3 kmOn descend en contrebas du village et on s’engage en pente douce dans une oliveraie qui mène à la rivière de Porto. On traverse le ponte Vecchiu, un magnifique pont génois avant de remonter les splendides gorges de Spelunca appréciées des hirondelles des rochers et des martinets à ventre blanc, deux oiseaux qui se ressemblent pour qui n’est pas ornithologue.
Un magnifique sentier bien aménagé permet de les remonter jusqu’au village d’Evisa. Nous arrivons aux confluents de l’Aïtone et de la Tavulella où nous traversons le pont génois de Zaglia. Construit en 1797 pour permettre aux bergers transhumants et aux habitants de se déplacer plus aisément, il est constitué d’une impressionnante arche pour accueillir le torrentueux débit saisonnier d’A Tavulella et de ses affluents.
En route, nous pouvons profiter d’une vue dégager pour observer le village d’Ota surplombé du Capu d’Ota. La légende raconte que depuis toujours des moines se relaient pour retenir le rocher à la pointe du sommet grâce à de très grosses chaînes. C’est un peu grâce à eux si hier, nous avons très bien dormi.
Le sentier monte en lacets serrés et offre quelques perspectives sur le paysage. Le Capu a u Monte et le Capu d’Ortu font partie des sommets qui se laissent observer à travers la végétation. En prenant de l’altitude, chênes verts, bruyères, arbousier et sorbets sont remplacés par les pins mésogéens. C’est la race méditerranéenne des pins maritimes. Il se mélange parfois avec le pin laricio, l’autre essence de pin qu’on trouve en corse.
Nous atteignons la route à l’entrée du village d’Evisa. Perché à 850 mètres d’altitude, le village domine la vallée de Spelunca. C’est le village du poète Minicale (1868 – 1963) qui excellait dans une sorte de slam à la mode corse. On se pose à une terrasse de restaurant bien ensoleillée pour le repas du midi. Pas de lyophilisés aujourd’hui !!
Après nous être calés l’estomac, nous quittons Evisa par un très beau sentier de châtaigniers. En Corse, la châtaigne est cultivée dans des exploitations familiales qui la revendent principalement sous forme de farine. Les fruits sont séchés, parfois passés au four, triés manuellement et moulus exclusivement à la meule de granite, silex ou schiste pour garantir sa finesse. Le volume de la farine produite est de l’ordre de 300 t. Sa commercialisation est encore centrée sur la Corse et s’effectue à 80 % auprès des ménages qui en perpétuent les traditions culinaires.
Le chemin est désormais commun au Mare è Monti nord et au Mare a Mare nord jusqu’à Cargèse. Nous descendons jusqu’au lit de la rivière Tavulella que nous traversons l’un après l’autre grâce à un pont mobile digne des anciennes infrastructures népalaises.
Nous gagnons le hameau abandonné de U Tassu avant de rejoindre le gîte Ustaria li a Rota à l’entrée du village de Marignana (720 m). Le gîte, à côté du cimetière, est un peu l’institution du village avec la Poste et la casa communal. Les anciens y viennent pour regarder la TV, boire un verre, mais surtout y trouver un peu de vie avant de rendre la leur. Un gîte fait de bric et de broc mais accueil sympathique.
Marignana – E Case
+ 733 m / – 821 m 15,6 kmDepuis le gîte, on remonte la route qui traverse Marignana. Le village ne compte plus qu’une centaine d’âmes contre plus de 1150 à la fin de la première guerre mondiale. Les cultures en terrasse sont aujourd’hui abandonnées et s’enfouissent dans le maquis. Fours à pains, séchoirs à châtaignes, lavoirs et moulins sont les témoins d’une ancienne vie rurale active. L’Eglise consacrée à Saint-Jacques le majeur est un bel exemple d’art baroque.
Nous nous engageons sur le sentier balisé en orange. Des cochons sauvages gambadent devant nous. Le chemin traverse une belle châtaigneraie et monte dans le maquis jusqu’à Culetta a u prunu et descend jusqu’à la source de Vaccarecciu.
Sous un soleil de plomb, nous montons jusqu’au col de Bocca Acquaviva perché à 1102 mètres. Nous nous posons sur l’espace herbeux pour nous restaurer.
Du col, le sentier descend sur les bergeries de Casta, longe un temps le ruisseau de Riogna avant de passer à proximité de mines de cuivre. L’itinéraire se poursuit sous le couvert des chênes verts, bruyères et arbousiers. Saviez-vous que l’arbousier peut mesurer jusqu’à 6 mètres de haut. Il prend une place particulière dans le maquis corse avec ses couleurs vives : fleurs blanches et fruits jaunes, verts ou rouges selon leur maturité. Il est fréquent de trouver à ses côtés la bruyère et le ciste.
Nous rejoignons une intersection. A droite, le chemin gagne le hameau de Revinda composé de 8 habitants à l’année. On y a recensé jusqu’à 300 habitants au début du siècle précédent. Nous continuons à gauche et arrivons au refuge d’E Case en un petit quart d’heure.
Situé dans un cadre montagneux paradisiaque avec une très belle vue sur le golfe de Chiuni, le refuge (☎ 04 95 26 48 19), au confort sommaire, ne comprend que 19 places. Restauré par le Parc Naturel Régional, il est géré par les propriétaires de la bâtisse, la très sympathique famille Charrol. L’alimentation en eau est assurée par une source. Merci de ne pas la gaspiller peut-on lire sur une affiche. Réservation conseillée pour la nuitée et obligatoire pour la restauration.
Contrairement à hier où nous avons rencontré de nombreux randonneurs à la journée dans les gorges de Spelunca, nous n’avons croisé personne aujourd’hui à l’exception des cochons sauvages et des taureaux qui se défiaient autour du refuge.
Le refuge E Case a fermé ses portes depuis notre passage. La ferme de Chiuni située à Cargèse, à 800 mètres de la plage de Chiuni, se propose pour dépanner les randonneurs de les récupérer au village de Revinda et de les déposer au même endroit le lendemain matin. Cuisine à base de produits frais.
E Case – Cargèse
+ 169 m / – 701 m 12,3 kmL’itinéraire démarre plein sud et rejoint les crêtes de Pianu Maggiore. Le ciel s’obscurcit au fur et à mesure que nous avançons. Nous descendons sur les bergeries de Santa Lucia (194 m) et devons rester vigilant aux petits cailloux qui jalonnent le sentier. Ça peut très vite être casse-gueule.
En nous approchant de la bergerie, une dizaine de chiens se mettent à aboyer. Ce sont des chiens de chasse attachés à leur niche. L’un d’entre-eux est bien excité et nous sommes heureux de voir que sa chaîne tient correctement. Si tel n’avait été le cas, je n’aurais pas donné beaucoup de chance à nos mollets. Putain de vie de chien quand même !
On poursuit sur une piste qui longe le ruisseau d’Esigna. A l’embranchement, nous décidons de quitter le sentier du Mare è Monti pour terminer l’itinéraire par la route. Nous n’avons pas envie de nous faire mouiller sur les derniers kilomètres.
Nous traversons donc le village de Lozi et rejoignons Cargèse par la D81. Lorsque nous passons le panneau signalisant l’entrée de notre terminus, une petite pluie se met à tomber. A trop chercher notre hébergement à Cargèse pour la nuit, nous nous trompons de chemin. Nous descendons jusqu’au port et remontons à l’embranchement qui suit l’Eglise Grecque pour nous installer dans notre nouvel hébergement pour la nuit.
Au resto , le déluge s’abat sur Cargèse. Nous avons bien fait de rentrer par la route pour gagner une heure de marche.
Cargèse – Ajaccio – Bastia en transports en commun
9h15. Nous montons dans le minibus qui nous conduit à Ajaccio, puis bus jusqu’à Cazzamoza avant de finir le trajet en train jusqu’à Bastia. Nous pensions au départ faire une halte à Corte pour découvrir la citadelle mais le temps pourri nous invite à nous rendre directement sur Bastia où il pleut comme vache qui pisse.
Installation à l’hôtel Napoléon. Petit hôtel confortable idéalement placé à deux pas de la gare routière et ferroviaire, de la place Saint-Nicolas et du Vieux-Port.
Le dimanche, visite de la ville avant de nous envoler pour Lyon via Easy Jet. Déjà se trame dans nos têtes un prochain voyage en Corse.
Informations pratiques
Argent
La carte bleue est rarement acceptée dans l’arrière-pays corse et les distributeurs de billets sont absents presque partout. Prévoir du liquide et des chèques en conséquence.
Quand randonner sur le Mare è Monti ?
Le printemps et l’automne sont les deux périodes les plus propices pour effectuer le Mare e Monti. Les gîtes sont généralement ouvert du 1er avril au 30 septembre.
Difficultés
Le Mare è Monti ne présente pas de difficultés techniques particulières mais s’adresse à de bons marcheurs en raison de la durée de la randonnée, des sentiers caillouteux et de la longueur de certaines étapes.
Partir seul ou avec une agence ?
L’itinéraire peut se réaliser seul ou avec une agence en formule liberté. Dans le premier cas, vous devrez réserver vous-même vos hébergements ; dans le second, la logistique est assurée par l’agence (le transport des bagages également).
Cartes, topo et guides
Le sentier Mare e Monti est très bien balisé. Le topo-guide peut donc suffire si vous ne souhaitez pas réaliser de variantes à l’itinéraire classique.
- Cartes de randonnée : Calvi cirque de Bonifatu 4149 OT – Porto Calanche de Piana 4150 OT – Vico Cargèse golfe de Sagone 4151 OT
- Topo-guide : Corse entre mer et montagne de la FFRandonnée
- Guide : Guide du Routard Corse
Fondateur d’I-Trekkings et des blogs I-Voyages et My Wildlife, j’apprécie le rythme lent de la marche et des activités outdoor non motorisés pour découvrir des territoires montagneux et désertiques, observer la faune sauvage et rencontrer les populations locales. Je marche aussi bien seul, qu’entre amis ou avec des agences françaises ou locales. J’accompagne également des voyages photo animaliers qui associent le plaisir d’être dans la nature et l’apprentissage ou le perfectionnement de la photographie animalière.