+1625m/-1050m
Ca va pas mieux pour Nico, journée difficile moralement et choix difficile au Caillou de Socques. Rencontre plutôt désagréable avec le gardien d’Arrémoulit.
Sinon l’Ossau c’est beau et Arrémoulit aussi!
Putain de cheville
Il a fait chaud toute la nuit: 20°C! J’ai beaucoup de mal à me lever, qu’est-ce qu’on est bien sur ces matelas dans cette mezzanine… Nico a mal dormi: il a toujours très mal, la fin de l’aventure est proche si ça continue comme ça.
Ca va pas être la fête aujourd’hui.
On part à 7h, dès 8h on a chaud même à l’ombre. Direction le col de Peyreget.
Plutôt que de prendre la bifurquation plus bas en vallée, on monte direct derrière le Cap de Pount par un chemin bien balisé par des cairns.
Je laisse Nico marcher à son rythme 20m devant: il a mal mais monte bien (400m/h). J’en profite pour m’arrêter humer l’air et observer la nature toutes les 10 minutes. C’est cool, mais on est inquiets même si on ne se dit rien.
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Col de Peyreget, on croise quelques grimpeurs en route pour le Pic, ils me font envie mais je ne suis pas là pour ça: ce sera pour une autre fois.
Descente à Pombie, la vue sur le pic est impressionnante, après les aiguilles d’Ansabère, c’est la deuxième paroi que l’on découvre.Nico aperçoit deux petits sacs accrochés à la paroi, il m’indique où regarder.
Je scrute, en fait c’est deux mecs en début d’ascension: l’éloignement et l’immensité de la paroi les rend minuscules. Il sont 20m au dessus des éboulis en dessous de la cheminée qui monte verticalement sur une bonne partie de la face.
Petite visite du refuge qui est rempli, des profs assis devant parlent de mutation, on fuit: je suis en vacance là !
La descente au Caillou de Socques est interminable, peut-être parce que le deuxième dépôt de vivres nous y attend, mais il y a autre chose. On retrouve la cache sans problème mais on n’a pas le moral. Nico a jonglé dans la descente et je crois qu’il pense à arrêter sans vouloir me le dire.
Alors il gamberge: "on se rend peut-être pas compte de ce que c’est de marcher trente jours, on est pas préparé", etc. Je sens un profond désarroi en lui. J’ai pas envie d’insister pour qu’on continue, je le laisse faire le point.
On réfléchit aux alternatives: du Caillou on peut facilement redescendre en vallée française, la route est là. Si on repart, on s’éloigne. Donc s’il faut aller voir un médecin faire un break autant y aller maintenant.
L’étape du jour est prévue à Arrémoulit mais au dessus du Caillou de Socques il y a une cabane dans laquelle on pourrait passer la nuit.
"Combien de temps jusqu’à Arrémoulit?" je lui réponds 2 ou 3 heures. "Bon on y va" demain on verra…
"Ok, on y va à ton rythme, moi ça ne me pose aucun problème"
Autre époque, autre sac: là avec 7kg nous devrions aller jusqu’à Bielsa en passant par le sommet du Vignemale…
Au dernier ruisseau avant de sortir des arbres, on mouille intégralement nos chemises que l’on remet à peine essorées. Quelle bonne idée! La fraicheur apportée par l’évaporation nous soulage pendant une bonne partie de la montée.
Ca me fait plaisir de constater que je me balade là où j’en avais chié il y a quelques années.
On passe près de quelques abris sous roche que je prends en photo.
Un gigantesque orage s’abat sur l’Ossau derrière nous, il disparaît presque entièrement.
On pense aux gars en paroi, pas cool pour eux ça!
Puis on arrive rapidement au col d’Arrious. Là deux possibilités: descendre au lac ou bien passer par le passage d’Orteig.
Pas d’hésitation! On prend plusieurs photos pour ceux que ça pourrait intéresser. Je l’avais également emprunté avec mon sac de 25kg donc là c’est la balade, je passe sans avoir à m’aider du cable. Par temps pluvieux ou neigeux, ce serait plus délicat mais le cable parcourt toute la longueur du passage. A moins d’avoir une crise de panique à cause du vide, pas de problème de sécurité à mon avis quand c’est sec.
Voici enfin le refuge d’Arrémoulit et le lac du même nom. On a mis beaucoup moins de temps que prévu et Nico est heureusement surpris d’y être arrivé si vite. On descend avec précautions dans le "champ de cairns" qui nous entoure. Un grand ménage serait à faire dans le coin. J’ose pas imaginer la galère pour les gars qui ont eu à chercher le refuge par brouillard.
On va pour s’assoir à la table devant le refuge, un peu de repos assis dans un si beau cadre après avoir failli abandonner il y a 2h.
Un mec est assis sur le banc en face et regarde vaguement en l’air…
– "vos affaires vous les mettrez derrière le refuge"
On répond sans broncher: "ok pour les affaires mais nous on peut revenir ici?"
-"vous…" et il termine sa phrase d’un geste de la main que j’interprête comme voulant dire "je m’en fou".
Il poursuit sèchement en nous disant " l’hélico va arriver ravitailler".
Ah ok, je cromprends mieux ses instructions: il ne veut pas que des affaires s’envolent durant l’approche de l’engin.
Je demande s’il arrive dans longtemps, il nous répond qu’il aurait dû être là il y a deux heures.
Obéissant aux "ordres" de celui qui doit sans doute être le gardien du refuge, on se lève pour poser nos sacs derrière. On y trouve d’autres personnes qui ont suivi les mêmes instructions.
"ben dis donc, il est toujours comme ça le gardien, ou il est particulièrement de mauvais poil là?"
"ouaip, pas cool le mec"…
On revient s’asseoir.
– "vous dormer au refuge?"
– "non"
– "l’aire de bivouac c’est la bas, suivez les cordes" toujours avec cet air antipathique.
Y a du boulot: on voit le gardien s’activer avec deux autres personnes du refuge pour débarrasser la zone de posé, Nico, moi et deux autres randonneurs les rejoignont pour les aider.
Pendant 45 min à rythme intensif, entre nos mains passeront des cartons entiers de bières, tablettes de chocolat, des fruits, des bouteilles de gaz de 20kg, etc.
Après une journée de marche et une cheville en vrac pour Nico, c’est presque de l’héroïsme!
Les Espagnols au bord du lac n’ont pas bronché, ils sont restés regarder puis il a fallu que l’un d’eux se dévoue pour plonger chercher les sandales (de l’un d’eux) dérivant sur le lac: elles s’étaient envolées avec hélico. Il est rentré bredouille.
Le gardien va-t-il enfin décoincer? Un "c’est sympa" à peine articulé parviendra quand même à nos oreilles…
En visitant le refuge on en apprend un peu plus sur le gardien: il organise pas mal d’expés dans le monde entier et tient le refuge depuis des dizaines d’années.
Bref, c’est pas tout mais il nous faut rejoindre "l’aire de bivouac" pour se trouver un coin d’herbe et les places sont rares.
On se contentera de terre. Je prends un bon bain dans un des petits lacs bordé de névés pendant que Nico va demander au gardien des conseils sur sa douleur au tendon.
Avec toutes ses expés, il a dejà dû voir ça et pourra peut-être nous donner une info.
I
Putain mais on lui a fait quoi pour qu’il soit aussi peu aimable? On le sait que t’es pas médecin…
Bref, l’info est là et "bien sûr" on se dit, qu’est-ce qu’on est cons, on boit pas assez!
Du coup Nico s’enfile 4L pendant la soirée.
On discute un peu avec des marathoniens qui bivouaquaient à côté puis au lit. Le brouillard qui était arrivé en fin d’après midi s’est dissipé et c’est beau. Demain sera peut-être le dernier de la traversée si ça va pas mieux.