A l’heure convenue, un taxi m’attendit au bas de l’hôtel. Les rues étaient désertes quand nous nous y engageâmes. Le château de Montlosier est situé au pied des Puys de La Vache et de Lassolas. Il faut compter trente minutes pour s’y rendre, malgré une faible circulation. Sur le siège arrière, je luttais pour conserver mes yeux ouverts ; mais en esprit et le ventre creux je salivais d’avance sur les prochains paysages uniques à admirer depuis une certaine hauteur. La journée promettait d’ailleurs d’être unanimement ensoleillé, sans encombre nuageux. C’était rarissime en ce pays devenu, en si peu de temps, une véritable éponge.
Mon taxi fit halte devant l’entrée du Parc Naturel des Volcans. Sur la même place de stationnement, étaient alignées quelques voitures, ainsi que deux 4×4. Dehors, la nuit était noire et fraîche. Sitôt réglé mon trajet auprès du chauffeur, je rejoignis à petits pas un groupe d’individus emmitouflés dans des anoraks et de grosses chaussures ou des bottes. Un type au crâne dégarni, sur lequel reposait une casquette bleue, certainement un des organisateurs, leva une feuille à hauteur des yeux et commença l’appel. Tous les inscrits étaient présents, alors le groupe se scinda-t-il en deux pour partir séparément dans les 4×4 mis à notre disposition. Chacun d’eux traînait, à l’arrière, une remorque parfaitement cloisonnée. Monté derrière le conducteur à la casquette, je compris que notre lieu d’appareillage serait le Puy Pariou. Quinze minutes suivant notre départ, nous nous interrompions au bord d’un champ, sur une route non fréquentée, à la sortie d’un village.
Les deux remorques se vidèrent de leur contenu, avec des gestes précis, par les pilotes qui nous accompagneraient tout le long de notre randonnée aérienne. En effet, le clou de mon spectacle se couronnerait par un survol de la chaîne des puys en montgolfière. Pour le moment, ces toiles en nylon ressemblaient davantage à des capotes géantes, étalées sur l’herbe humide, prêtes à l’usage. Certains passagers s’activaient pour secourir les pilotes à monter tous les éléments nécessaires à la préparation des ballons, séparés entre eux par une vingtaine de mètres. L’assemblage fut suivi conjointement par l’installation de deux énormes ventilateurs, au seuil de la toile. Les brûleurs, fixés au centre de la nacelle posée sur son flanc, se mirent alors en action : la capote se gonfla en accéléré, se souleva par côtés, pour former une bouillotte grandeur nature. La suite s’enchaîna dans une pure logique : la nacelle, entraînée, se dressa à la verticale, tandis que le soleil, selon son rythme légendaire, illuminait le champ d’une couleur rosée.
La douceur de l’été succéda à la fraîcheur matinale, pendant que nous réalisions tous que nous allions vivre bientôt une aventure à part entière. Mon cœur battait la chamade comme jamais, le face-à-face avec la voûte céleste et ses chefs-d’œuvre d’ici-bas était proche. Notre impatience générale fut finalement récompensée par le sifflet final des pilotes : nous nous embarquâmes dans l’un des ballons d’une contenance maximum de huit passagers. Un premier groupe partit d’abord ; moi et mon groupe, depuis la nacelle du second ballon resté encore à terre, nous nous exaltâmes devant la montée de l’autre ballon. Il s’agissait d’un envol souple et sans accélération excessive. Nous-mêmes, une fois les brûleurs poursuivant le gonflage continu de la toile, décrochâmes du sol herbeux dans un mouvement bien proportionné. Nous amorçâmes une montée qui convertissait notre appréhension du vertige par une fascination toujours grandissante. Imaginez une grosse limace s’élever vers le ciel, le museau pointé à la verticale et le postérieur tournant au gré de la respiration de l’air ! Les vents étant favorables et la météo clémente, le décollage se déroula tranquillement, sans incident.
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Après une inclinaison selon une trajectoire prédéfinie, le ballon se stabilisa en maintenant son altitude. Le soleil, brillant de mille feux, nous talonnait le pas, faisant témoin de notre balade hors du commun. Nous dépassâmes paisiblement la pointe du surprenant Puy-de-Dôme. Une auréole lumineuse l’encerclait.
Nous nous hissâmes à plus de mille mètres d’altitude par rapport à notre point d’envol, équivalent à 2600 mètres de hauteur depuis le niveau de la mer. Tous les points culminants de la région me paraissaient minuscules. Nous survolâmes des paysages boisés, longeâmes des plaines, survolâmes des villages et des champs couverts de tâches blanches : des vaches ! Le pilote s’amusait parfois, en guise de démonstration, à activer les brûleurs pour nous montrer les vaches s’agiter et s’enfuir comme folles. Certains paysans, le menton et le poing levé, pestaient après nous. Au détour d’une colline, nous découvrîmes un château dissimulé entre des rangées de bosquets. Par moments, les appareils photos crépitèrent pour fixer ces paysages qui n’apparaîtraient plus de la même manière une fois en bas. Aucune turbulence ne faisait gigoter notre moyen de transport aérien, aucune vitesse ne nous signalait la limite, aucune nuisance sonore nous engorgeait. Le temps s’était arrêté. Plus loin, nous doublâmes le premier ballon, qui poursuivait sa route en basse altitude, presque à ras motte. Le ciel devenant plus illuminé par le soleil, toujours dans notre dos, je parvenais à reconnaître des chemins et des sentiers pour les avoir parcourus à pied récemment. A notre gauche, se dessinait dans un creux la ville de Rochefort-Montagnes et, encore plus loin, dans la même perspective, se dressaient les deux fabuleux et redoutables pitons rocheux à la formation insolite : Tuilière et Sanadoire, reconnaissables aisément par leur tête feuillue et leur silhouette particulière. J’aurais tant voulu que nous poussions notre balade aérienne jusqu’à elles ; hélas, il fallait déjà songer à redescendre car notre heure de vol expirait bientôt.
Une autre solution se solidifia en nous : embarquer dans le deuxième véhicule, tandis que le premier se débrouillerait pour s’en sortir seul. En jetant un regard sur ma montre, mon étonnement atteignit son comble : depuis notre atterrissage en douceur, deux heures s’étaient écoulées ! Exit mon petit-déjeuner à la terrasse de mon hôtel clermontois !
Ma réapparition à Clermont-Ferrand, jusqu’à mon départ en train dans l’après-midi, fut vide d’intérêt. En moi, je conservais des clichés peuplés de légèreté, de brillance, avec un arrière-goût d’immensité terrestre.
Je suis un passionné de montagne. J’aime prendre de l’altitude, à l’instar de ceux qui prennent du recul.
Ma pratique du trek se compose en solitaire depuis de nombreuses années, en semi-autonomie sur plusieurs jours, souvent l’été, rarement l’hiver. Photographe passionné, j’apprécie de faire des reportage-photos pour exprimer la beauté des paysages, à califourchon sur les plus hauts cols. Aussi, je retranscris par écrit toutes mes aventures pédestres, avant de partager ces découvertes par le biais de mes sites dédiés au voyage.
Nul besoin de consulter un spécialiste en cas de déprime ou de crises d’angoisse, la randonnée en montagne est mon médicament naturel !
Mes sites à consulter pour continuer ensemble l’aventure :
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