C’est en tant qu’instructeur fédéral snowboard-alpinisme FFCAM que je forme des initiateurs en snowboard de montagne, et voici donc le récit de ma dernière expérience lors de l’encadrement de deux stages Initiateur stagiaire snowboard de randonnée. Ces stages durent 4 jours chacun, en raid itinérant en refuges gardés dans la vallée de la Clarée dans le massif des Cerces. Je suis accompagné pour l’encadrement de mon ami guide de haute montagne Jean-Pat Comba, et nous avons cette année Olivier et Patrick, stagiaires pour devenir instructeurs, pour nous aider dans la formation.
Olivier sera présent sur le premier stage avec Adeline, Steffi, Matt, David, Thierry, Damien, Denis et Kewin qui seront stagiaires pour devenir initiateurs stagiaires. Patrick sera quant à lui présent sur le second stage avec Lauriane, Juju, Claire, Julie, Vincent, Arnaud, Damien et Benji. À l’issue de ce stage ils pourront encadrer des groupes en montagne lors de leur formation pratique qui doit durer entre une et trois saisons, puis revenir pour être (enfin) certifiés.
Le rendez-vous est donné la veille au soir au Gîte La découverte à Névache, afin de faire connaissance et de rappeler les attendus de fin de stage, globalement trois big ideas en plus de toutes les compétences techniques :
- Être garant de la sécurité du groupe encadré
- Apprendre quelque chose à chaque sortie
- Du fun !
Également, les stagiaires doivent prendre conscience qu’ils doivent opérer un changement de paradigme : ils ne sont plus de simples pratiquants expérimentés, mais doivent maintenant adopter la posture d’un encadrant. Ce soir, ils doivent préparer la course du lendemain, avec un objectif d’arrivée au refuge de Buffère, et devront encadrer un groupe de ‘pratiquants débutants’ à tour de rôle pendant la journée.
Je vais, dans ce récit Raid splitboard dans le massif des Cerces, faire un mix des deux stages, en choisissant à chaque fois la journée qui me parait la plus intéressante à partager du point de vue de l’itinéraire.
J1. Névache – Refuge de Buffère, puis Crête de Baude (2571m)
+ 1020 m / – 550 m 11,3 kmAu matin, après avoir déplacer les voitures et refait un check matériel, le lead est pris par une team féminine. Steffi et Adeline mènent la danse, et étonnamment le rythme est pour une fois cool en début de stage. En général, les stagiaires ont toujours tendance à partir trop vite. L’itinéraire pour monter au refuge est évident, sur une piste damée et fléchée, mais nous trouvons quand même quelques exercices : descente de quelques mètres en mode ski animé par Adeline et Steffi ; et quelques enseignements : géologie du terrain prodigués par David qui est géologue. J’apprends qu’il y a du silex dans la roche de la vallée de la Clarée.
En route, nous nous délestons au refuge afin d’alléger nos sacs à dos, et de confirmer notre présence. Je suis un peu nostalgique de revenir ici, car dans ce raid que j’ai parcouru de nombreuses fois, le refuge de Buffère avec son architecture aux multiples cachettes et demis niveaux, est mon préféré. L’accueil de Guillaume et Aude est de plus très chaleureux.
Pique-nique à proximité, puis nous poursuivons vers la crête de Baude emmenés par Denis et Damien où nous faisons travailler le choix de la trace aux stagiaires. Le but : faire le moins de conversion possible. Faire une conversion est énergivore et est généralement synonyme de pente plus forte que là où on peut faire un pas tournant.
Une fois en haut, c’est au tour de David de prendre le lead. La neige a eu le temps de regeler et la consigne est claire : on doit y aller tranquille et ne pas se laisser surprendre par les changements de neige.
Arrivés au refuge, douche bière débriefing puis le temps du repas arrive rapidement. Les stagiaires se rendent compte que ce n’est pas si simple de devoir prendre toutes les décisions qui influent sur la sécurité du groupe, et qu’ils sont bien fatigués mentalement de ces multiples réflexions et prises de décisions constantes pendant une sortie.
Pendant le repas, Thierry nous régale de son exposé sur l’Histoire du snowboard : pour moi un retour en adolescence et dans les années fluo fun. Plus sérieux, Adeline nous décortique le BERA du lendemain avec comme angle l’historique des BERA des derniers jours, exposé également rondement mené.
En fin de soirée, Jean-Pat et moi allons nous coucher, alors que les stagiaires entre les mains d’Olivier doivent préparer notre journée du lendemain. En voyant leurs visages fatigués mais heureux, cela me rappelle ma formation d’initiateur il y a tout pile 10 ans en arrière.
J2. Refuge de Buffère – Dôme Ady – Refuge du Chardonnet
+ 750 m / – 580 m 10 kmLe départ est bien plus efficace que la veille : Thierry qui a le lead du matin se met parfaitement dans sa posture de leader. L’itinéraire est une succession de bosses et de courtes descentes. La neige tantôt gelée tantôt molle, met à mal les prises de décisions sur la mise ou non des couteaux. En dehors de ça, les communications tournent autour de conversations informelles mais qui ont leur importance pour la cohésion de groupe. La compétition diminue, les guerres d’égo disparaissent, et l’entraide et la bienveillance prennent une grande place. Des amitiés se créent.
Au refuge, après avoir déposé des affaires et déjeuné, nous repartons pour très rapidement faire un exercice de pas tournants et conversions. Cela parait anodin, mais ils seront initiateurs à l’issue du stage et devront donc initier des débutants à la pratique du snowboard de randonnée. Et entre savoir faire une conversion et expliquer comment la faire, ce n’est pas la même chose.
Une fois l’atelier terminé, le choix de la trace de Steffi nous amène à point nommé devant une petite arête école afin d’y faire des exercices de technique alpine. Tout le monde est content de chausser ses crampons et sortir son piolet pour monter l’arête du Dôme Ady. Là encore, les filles sont devant et leadent deux des trois cordées.
Au sommet, nous chaussons enfin nos snowboards pour descendre, et juste avant d’arriver au refuge du Chardonnet, les stagiaires nous achèvent avec l’exercice de recherche DVA qu’ils avaient prévu depuis la veille. Beaucoup d’erreurs sont commises et le débriefing autour de la bière est très enrichissant.
Le repas est servi et ce soir c’est au tour de Steffi de nous causer des biais cognitifs influant les mauvaises prises de décisions ; et de Denis de faire sa causerie sur les DVA. Deux exposés encore une fois très intéressants et bien construits. En fin de soirée, je reste lors de la préparation de la sortie du lendemain : j’assiste à un beau partage. Tout le monde s’écoute et prend en compte les informations retenues de tout un chacun. Cela va être constructif et je suis confiant sur leur itinéraire choisi pour rallier notre refuge suivant, je peux aller me coucher.
J3. Refuge du Chardonnet – Crête de la Casse Blanche – Refuge de Ricou
+ 930 m / – 1030 m 11,5 kmEncore une fois nous nous levons tôt pour être sur nos spatules prêts au départ à 8:00. Le regel autour du refuge du Chardonnet est bon.
Claire nous emmène en direction de la crête de la Casse blanche jusqu’à atteindre les pentes Sud-Ouest du Queyrellin où nous mettons les couteaux pour une traversée en dévers gelée. En chemin, nous apercevons quelques chamois. Au pied de la pente de la crête de la Casse blanche, la pente à 30~35° nous oblige à chausser les crampons car nos splitboards ne tiennent plus sur la neige dure, même en couteaux c’est dangereux. L’occasion pour certains de tester leurs nouveaux crampons.
Quelques dizaines de minutes plus tard, nous arrivons enfin au col de la crête de la Casse blanche. Nous sortons les cordes pour poursuivre sur la crête, toujours snowboard au dos. Nous faisons trois cordées en encordement court : 1,50m entre nous, avec la corde attachée autour de nos tailles par un noeud de chaise. Une bonne révision des noeuds et des anneaux de buste pour pas mal de stagiaires. La progression sur la crête est très belle, et laisse apparaître la Barre des Écrins, le Pelvoux, et les Aiguilles d’Arves.
Une fois au sommet de la crête de la Casse blanche, on constate que le début de la descente dans la combe du lac rouge est bien pelée par le vent. Nous descendons donc le début crampons aux pieds, avant de pouvoir chausser nos boards.
À la descente, la neige s’avère bien tassée, ça fait les cuisses !
Une fois en bas, nous franchissons la rivière de la Clarée au pont du Moutet où nous mangeons un bout.
S’ensuit une montée menée par Lauriane qui entame la marche en direction du refuge de Ricou. La neige est transformée en une sorte de granita fondue, et la progression dans les arbres ajoute une difficulté supplémentaire. On assiste à un sauvetage de Ben qui est à la peine avec ses peaux qui ne collent plus : Julie, qui a une grosse caisse et première au sommet, redescend pour l’aider.
Une petite descente, que certains feront en mode ski tant elle courte, nous permet d’enfin arriver au refuge de Ricou.
Comme à chaque fin de journée, nous débrieffons avec une bière en terrasse. Le coucher du soleil se pointe et il commence à faire bien froid, nous rentrons nous mettre au chaud. L’heure pour Pat, Jean-Pat et moi de nous retrouver tous les trois pour parler de la validation des compétences des stagiaires. Les fiches sont longues et fastidieuses à compléter, mais nous trouvons une forme d’efficacité.
Le glas du repas du soir sonne et surtout celle de la préparation de la course du lendemain. C’est notre dernière soirée ensemble, et l’ambiance est à la fête ce soir au refuge, pas facile de se concentrer sur les cartes et les topos. Nous irons nous coucher bien fatigués.
J4. Refuge de Ricou – Pas du lac blanc – Retour à Névache
+ 680 m / – 1200 m 17 kmComme chaque matin, départ 8:00. À ceci prêt que le vent souffle fort ce matin. L’objectif est la crête de Môme, un peu plus haut que le refuge. L’idée est de faire une petite course afin d’arriver au plus tard à 14:00 à Névache.
La neige est bien gelée, et nous perdons beaucoup de temps en alternant entre couteaux et crampons. Nous arrivons au sommet vers 11:00.
Mais nous ne partons pas aussitôt sur la descente : une longue discussion commence pour savoir quelle option choisir. Chacun y va de son avis et c’est Claire qui prend la décision finale car elle a à ce moment là les rênes du groupe : ce sera le vallon du Vallon. Pas l’option qui me faisait rêver car une pente raide décaillée au soleil me faisait de l’oeil, mais bon il faut jouer le jeu. La descente dans le vallon ne sera finalement pas si mal.
Un peu avant d’arriver à Névache, le débriefing de la journée et du stage se fait en pique-niquant. Enfin, un dernier petit effort et nous voilà aux voitures, l’heure de nous dire au-revoir.
Photo-reporter outdoor, c’est dans les Alpes autour d’Annecy que je passe mon hiver en splitboard ; l’été mon côté globe-trotter m’amène à pratiquer la plongée sous-marine à travers le monde. Aux inter-saisons, trekking, VTT, bikepacking, paddle, alpinisme et via ferrata viennent compléter ma passion pour les grands espaces !
Bonjour. Je recherche un plan pour une sortie de 3-4 jours autour du 24-27 mars. Je suis splitboarder, avec de l’expérience. Auriez-vous par hasard une offre correspondante? Merci
Salut Emmanuel,
nous ne sommes pas une agence donc nous n’avons pas d’offre de séjour. Nos articles sont des récits d’aventure que nous partageons avec la communauté. Pour davantage de récits, tu peux aller dans le menu Activités -> Ski de rando & Splitboard, ou encore avec l’outil de recherche avec splitboard en mot clé.
Sinon selon où tu habites, les CAF d’Annecy, Grenoble, Lyon, Marseille, et Toulouse ont de bonnes sections split. Enfin, si tu cherches un guide HM, Jean-Pat Comba est top.
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