Dans les rizières du nord Vietnam, j’ai fait un beau trek de 4 jours en guise de prélude à un grand voyage de découverte du Vietnam mais aussi du Cambodge avec La Balaguère. Un trek facile où j’ai dormi chez l’habitant, à la rencontre des minorités du Tonkin dans la région de Ha Giang. Loin des circuits classiques.
Mes premières rizières en terrasses du nord Vietnam et ma première nuit chez l’habitant
+ 293 m / – 2 m 5,1 kmMes premières rizières en terrasses du nord Vietnam ! Depuis 3 heures qu’on cahote sur cette route défoncée, j’en ai déjà vu évidemment. Mais seulement à travers les vitres du minibus qui nous amène de Hanoï. On a quitté la capitale du Vietnam tôt ce matin pour rouler presque toute la journée. D’abord sur un axe très fréquenté, en direction de la Chine. Puis, toujours plus près de la frontière, sur une petite route se faufilant dans la montagne. Où sont apparues les forêts de bambou et les plantations de thé, en même temps que les rizières en terrasses.
Là, ce sont les premières que je foule en mode rando, avec mes chaussures de marche aux pieds, mon petit sac sur le dos. Pas les dernières : je vais en faire une cure dans les prochains temps, et je ne m’en lasserai jamais. En cette fin d’automne, la plupart sont pourtant à sec et donc pas vraiment à leur avantage. Qu’importe. Tout en les contemplant, je songe à l’ingéniosité de ceux qui les ont façonnées, à la masse de travail que cela représente. Ces rizières sculptent le paysage, lui donnent une autre dimension. A mes yeux, elles sont superbes.
C’est déjà le milieu de l’après-midi, la première marche de ce trek ne sera pas bien longue. Non, moins de deux heures, mais c’est une montée bien raide. Elle nous conduit jusqu’à un hameau collé à flanc de montagne. Avant les premières maisons, se dresse un chapiteau où s’affaire un groupe de femmes. Quelques unes sont vêtues de tenues traditionnelles très colorées, elles sont de la tribu des Hmongs fleuris. Tout ce petit monde nettoie : la veille s’est terminée une grande cérémonie de mariage.
Isolée en hauteur, à quelque 700 m d’altitude, la maison de notre hôte surplombe quelques autres fermes éparses. Après les trépidations de la capitale, le confort de ses hôtels, le contraste est rude. La nuit prochaine, ce sera sur un matelas -sous une moustiquaire tout de même- posé dans une longue salle qui laisse apparaître la charpente de bois et le toit en tôle ondulée. Et la douche, ce sera dans une petite cabane rudimentaire qui fait aussi office de toilettes. Personne ne fait la tête dans notre petit groupe : c’est aussi ce que nous sommes venus chercher.
En attendant le repas, qui chauffe sur un feu allumé à même le sol, on fait connaissance. Ici, comme presque partout, quatre générations vivent sous le même toit. Entre la volaille et les buffles, le riz, le soja et toutes sortes de légumes, la ferme se suffit à elle-même. Préparé avec les produits maison, le repas sera d’ailleurs délicieux. Et la nuit, hormis un coq chantant de manière intempestive, fort bonne !
Jour 2, de Tà Hô Pièn à Nâm Pièn
+ 624 m / – 575 m 16,8 kmLa bouche est tout rouge d’avoir mâché et chiqué tant de feuilles de bétel ; les dents noires, rares et déchaussées pour la même raison. Au passage de notre groupe, un très beau sourire éclaire le visage de cette femme, occupée à tresser des paniers. Je pensais que les ravages du bétel -au moins consommé de cette manière- ne concernaient plus que les vieillards. Il faut croire que non, cette femme n’est pas très âgée. En tout cas, elle ne se fait pas prier pour expliquer, ralentir son geste, car elle est en plein travail, et montrer par le détail comment procéder.
Un peu plus loin, notre chemin nous fait longer une école maternelle : étonnés, mais pas plus que ça, les gamins hauts comme trois pommes nous font eux aussi de grands sourires depuis l’unique salle de classe. Tout en restant rivés à leurs petites chaises et sans piper mot.
Des scènes de la vie de tous les jours, ici dans ces villages du Tonkin, comme j’ai souvent l’occasion d’en contempler. Ma deuxième journée de trek commence en douceur, de village en village, de vallon en vallon. Là, c’est une jeune fille qui mène des buffles aux champs. Plus loin, un paysan qui retourne ses rizières avec une charrue en bois tractée par un buffle.
D’ailleurs, de ces gros animaux qui ont l’air si paisibles, je me méfie pourtant lorsque j’en croise sur les sentiers. Ce qui arrive assez souvent. Mieux vaut se pousser et faire de la place : un coup de corne peut faire très, très mal.
Ce n’est pas encore le grand bond dans une nature sauvage, comme j’en rêve parfois. Mais je me laisse apprivoiser par ces paysages nouveaux. D’ailleurs, nous avons aussi notre compte de petites aventures. Un passage à gué, par exemple. Pour franchir ce ruisseau, deux options : se mouiller les pieds -chaussés, pas chaussés, c’est selon- dans une vingtaine de cm d’eau, ou sauter de rocher en rocher avec un peu plus de fond. Chacun fait à sa guise, bien sûr. Le gag est que l’histoire s’est répétée trois fois en moins d’une heure, sur le même ruisseau. Mais sans rien entamer de la bonne humeur de chacun !
Le retour du soleil, qui a joué à cache-cache toute la journée, y est peut-être pour quelque chose. Tant mieux, car après cela, la dernière partie de la journée est plus rude : une heure de montée droit dans la pente.
Au bout, notre gîte d’étape se dévoile : une grande maison sur pilotis. Superbe. L’intérieur est constitué d’une seule grande pièce, chaleureuse. Le plancher est fait de bambous, et tout cela me paraît bien instable. Mais ce n’est qu’une impression, même si chaque pas fait bouger le plancher en tout sens.
Jour 3 : de Nâm Pièn à Giàng Ha
+ 441 m / – 498 m 11,5 kmC’est une journée de marche qui commence comme les autres, joliment : des pans de brume s’accrochent encore çà et là aux montagnes, les nimbant d’une auréole romantique que j’adore.
Le parcours débute aussi de manière particulièrement charmante. Nous marchons sur les hauteurs, traversant rizières et impressionnantes forêts de bambous.
Ce sont des bambous gigantesques, encore plus que les jours précédents, les plus grands que j’aie jamais vus. Ce qui me fait dire qu’ils sont sans doute très vieux, d’autant que les plus hauts ont le tronc recouvert de mousse. Mais pas du tout. C’est une variété géante, tout simplement, et ces bambous n’ont guère plus de deux ou trois ans. Ils poussent très vite, et très haut, fournissant force bois de construction et combustible à qui veut bien se donner de la peine. Voilà qui m’en bouche un coin !
Puis, après une incursion sur un chemin carrossable et défoncé par les camions -je n’aime décidément que les sentiers- , l’itinéraire d’aujourd’hui nous amène dans une vallée perdue qui me plaît beaucoup. Justement parce qu’elle est loin de tout, peu fréquentée pour ne pas dire du tout.
La pause déjeuner nous fait s’arrêter chez un agriculteur de l’ethnie des Yaos rouges -ici c’est leur territoire- non loin du col de Khôa Trung. Une belle maison, qui a fière allure. Son propriétaire plante du riz, bien sûr, ainsi que du thé. Il dispose de toutes les machines pour le trier et le sécher. Il cultive des plantes médicinales aussi, de la cardamome par exemple. Et il a encore une ruche, installée dans un tonneau creux qui repose tout contre un mur de sa maison.
Pour moi, il est difficile de différencier une ethnie d’une autre : les vêtements, exceptés pour les femmes et encore, souvent d’une certain âge, sont maintenant les mêmes pour tous. La plupart du temps, c’est la forme et le style de la maison qui donnent une indication.
Mais la chose a toujours son importance. Ne serait-ce que pour respecter les règles et tabous, qu’il importe de connaître. Chez les Yaos rouges, par exemple, un homme et une femme -même mari et femme- ne peuvent se trouver dans un même lit dans la pièce où trône l’autel des ancêtres.
Quelques heures plus tard, nous parvenons dans le village de l’autre côté du col. C’est jour de fête : on célèbre justement la réunification des ethnies.
Puis c’est la descente dans la vallée, rapide. Notre hôte de ce soir est un Tay : lui aussi est producteur de thé, mais à plus grande échelle puisqu’il exploite plusieurs hectares. D’ailleurs, dans un coin de la grande salle de sa maison, émergent deux énormes sacs. Ils contiennent du thé, au moins 50 ou 60 kg chacun ! Et Tinh est très fier de nous en faire goûter : plutôt corsé, son thé vert est très bon.
Jour 4 : de Giàng Ha à Pan Hou
+ 211 m / – 492 m 10,2 kmCette dernière journée est l’étape la plus courte du trek. Et, mais ce matin je ne le sais pas encore, la plus belle ! Des paysages de rêve tout au long de la marche, sans une seule fausse note. Un décor de cinéma, sauf que c’est pour de vrai. De plus, il fait beau dès les premières heures, contrairement aux jours précédents où le soleil ne daigne apparaître que l’après-midi.
Histoire de voir si on n’a pas perdu le coup, un petit passage à gué seulement quelques centaines de mètres après la mise en route… En fait, le petit cours d’eau que nous venons de traverser, nous ne le quitterons plus pendant un bout de temps, abandonnant assez vite les rizières du haut-plateau.
Pendant que nous grimpons dans la montagne, il devient un torrent de plus en plus impétueux, se frayant un chemin dans des gorges spectaculaires et étroites. Au passage se laissent admirer quelques belles cascades, plus ou moins enfouies sous une végétation luxuriante. J’aime beaucoup ces endroits au charme envoûtant. Et au moins autant les bambous, que l’on trouve partout. Ils sont très communs, ici en tout cas, mais ajoutent une note poétique au paysage qui me ravit.
Brève rencontre avec un cueilleur de thé. En fait, c’est un gardien de buffles qui améliore son ordinaire tout en s’occupant. Il ne prélève que les plus jeunes pousses des plantes sauvages -elles prolifèrent par endroits-, beaucoup mieux payées car garantes d’un meilleur breuvage. Sur l’autre versant de la montagne, devenu un véritable jardin avec beaucoup d’arbres fruitiers -papayes, mangues, citrons…- nous croisons encore une cueilleuse, dans une petite plantation cette fois. Plutôt coquette, elle se prête aux photos avec des mines de jeune star !
Maintes fois, j’ai entendu dans les arbres le cri du coucal, un perroquet, sans jamais l’apercevoir. Cette fois, si, même de manière très fugitive : presque noir, orange sur le dos, il est quand même de la taille d’un petit poulet. Ce sera le seul que je verrai.
Les rizières, en terrasses cette fois, font à nouveau leur apparition. Leurs formes dessinent d’extraordinaires arabesques dans la montagne. Superbe ! Là, plusieurs fois, notre groupe croise des buffles sur les sentiers étroits. Prudemment, nous laissons toujours la priorité.
Et puis c’est la descente dans la vallée, avec le retour à la civilisation. En l’occurrence un superbe et confortable lodge qui se fond dans le paysage. Là, m’attend un bain traditionnel aux herbes médicinales dans une grosse jarre en terre cuite. Je m’y prélasse longtemps, gagné par la zénitude. En songeant à ce trek, pas encore vraiment terminé dans ma tête.
Informations pratiques – Trek dans les rizières du nord Vietnam
Comment y aller ?
Vol international jusqu’à Hanoi, direct ou avec escale.
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Avec qui partir ?
Ce trek dans les rizières du nord Vietnam a été réalisé en première partie d’un beau voyage baptisé « Vietnam – Cambodge: minorités, Mékong, Angkor ». Il est proposé par La Balaguère -l’un des plus grands noms français du voyage à pied- basée dans les Pyrénées, en pleine montagne.
De niveau facile et classé « une chaussure », le trek s’adresse à tous publics et ne nécessite aucune capacité particulière si ce n’est savoir s’adapter à des conditions de vie spartiates. Mais tous les repas, y compris le midi, sont préparés par des cuisiniers, chauds et pris dans des maisons.
Durant les quatre jours de marche, les participants ne portent que les affaires de la journée. Leur bagage est acheminé d’un hébergement à l’autre. Il doit cependant s’agir d’un petit bagage, ne contenant que les effets nécessaires durant le trek. La valise principale, quant à elle, reste à l’abri dans un hôtel de Hanoï.
D’une durée de 23 jours et 22 nuits, le voyage est proposé tout au long de l’année. Il comporte 19 jours de marche, de navigation et de visites pour découvrir les principaux sites du Vietnam, durant deux semaines, puis Phnom Penh et Angkor, durant une autre semaine. Un programme aussi complet que varié !
Bibliographie
- Lonely Planet Vietnam
- Vietnam : le petit guide des usages et coutumes
- Easy Vietnam : Les meilleures recettes de mon pays tout en images
Journaliste professionnel venant de la presse régionale, j’ai toujours aimé bouger. Au fil de mes pérégrinations, j’ai découvert le voyage à pied et à vélo, que j’apprécie énormément l’un comme l’autre. Et plus j’en fais, plus j’en redemande !
Loin de réduire le trek à des sentiers de randonnées en montagne, c’est aussi l’occasion de faire des rencontres et de découvrir de nouvelles cultures, même dans des régions reculées ou peu fréquentées. Merci pour ce récit qui donne vraiment envie de découvrir le Vietnam, idéal pour partir à l’aventure et se dépayser.
Ces régions du nord sont sans doute l’une des dernières parties les plus à l’écart de la civilisation moderne du Vietnam. Ton article me donne vraiment envie d’y aller.
Merci Dominique ! Et c’est aussi mon opinion sur ce sujet.