Retour sur Cauterets
Revenir à Cauterets 10 ans après mes premières randonnées itinérantes organisées par mes soins revêt un caractère tout particulier.
J’ai le sentiment de revenir un peu sur les origines d’I-Trekkings.
C’est assez émouvant de se souvenir des lieux où je suis passé avec Djodjo : le Pont d’Espagne, les lacs de l’Embarrat, les refuges Wallon et des Oulettes de Gaube, le Vignemale et la vallée de Lutour pour ne citer que quelques lieux remarquables de cette randonnée à l’ombre du Vignemale.
Pour rejoindre Cauterets, il nous a fallu prendre un train jusqu’à Lourdes puis un bus jusqu’à la station thermale. Le site Voyages-Sncf.com ne donne aucune indication sur le trajet Lourdes-Cauterets. C’est au guichet SNCF ou même auprès du chauffeur qu’il faut acheter le billet du car.
Randonades est une agence de randonnée « 100% Pyrénées » implantée à Prades dans les Pyrénées Orientales. Créée en 1990, Randonades a pour vocation de vous emmener chez elle, sur les sentiers des Pyrénées et de la Catalogne que les accompagnateurs en montagne connaissent comme leur poche. Randonades propose une cinquantaine de randonnées accompagnées et en liberté (avec un topoguide mais sans accompagnateur), été comme hiver, dans les Pyrénées, en France comme en Espagne. |
Des airs de printemps
Au moment où j’écris ces lignes, il neige en abondance sur les Pyrénées et Cauterets. A notre arrivée dans la station thermale à la fin décembre 2012, le temps était plutôt printanier : grand soleil et température avoisinant les 15°C. La neige était peu visible sur les sommets mais des skieurs prenaient le télécabine. A priori, il devait donc y avoir un peu de neige en altitude.
On s’installe à l’hôtel des Marronniers pour une nuit avant le rdv du lendemain à 9h00 dans le centre de la station de Cauterets.
Vallée de Lutour
+ 540 m / – 555 m 5h009h00. Rencontre avec Blandine, l’accompagnatrice en montagne Randonades et le reste du groupe de randonneurs devant l’ancienne gare de Cauterets réalisée entièrement en bois. Blandine déconne d’entrée de jeu. Le ton est donné, le groupe a l’air répondant…
Dans l’enceinte du Parc National des Pyrénées
Avec la camionnette, on rejoint les lacets en épingle au dessus de la Raillère, non loin des thermes des Griffons à l’entrée du Parc National des Pyrénées. Créé en 1967 pour protéger les 45 707 hectares de territoire qu’il occupe sur plus de 100 kilomètres de long sur 2 départements (Pyrénées-Atlantiques et Hautes-Pyrénées) et 2 régions (Aquitaine et Midi-Pyrénées), du Gave d’Aspe à la Neste d’Aure, le long de la frontière espagnole.
Raquettes fermement accrochées sur le sac à dos, nous commençons à remonter la vallée de Lutour également nommée vallée d’Estom en raison de la présence du lac d’Estom à 1804 m.
Pique-nique royal à la cabane de Pouey-Caut
Nous ne remonterons pas les 10 km de la vallée et n’iront pas non plus jusqu’au lac d’Estom. Nous traversons des forêts de pins sylvestres et de sapins entrecoupées de clairières. A la jumelle, nous voyons nos premiers isards dans les combes raides du Pic Mayouret (2688 m) et rejoignons la cabane de Pouey-Caut (1530 m) bien dissimulée du fond de vallée par un rocher. Construit par les militaires, cet abri non gardé pour 4 personnes environ en forme de tunnel est recouvert de terre et d’herbes à la façon des maisons Hobbit (Longitude: -0.09611 Latitude: 42.82923).
On y mange comme des rois. Blandine a apporté tout son garde-manger pour agrémenter le pique-nique et même une bouteille. D’ailleurs, ça sera un des crédos de la randonnée, tous les midis, il y aura des extras régionaux apportés par les randonneurs : foie gras, cidre belge à la poire, paté maison, chocolat, bouteilles de vin. Un groupe plutôt épicurien !
Arrivée au Chalet du Clot
Nous ne monterons pas beaucoup plus haut que la cabane et revenons à la camionnette pour un petit transfert au pont d’Espagne. Là, Frédéric Walton, le gérant du chalet refuge du Clot (1562 m), nous attend avec son scooter pour prendre les bagages. C’est à pied que nous rejoignons le refuge en 15 mn. Il est la propriété de la commission syndicale de la vallée de Saint-Savin qui regroupe les communes de Adast, Cauterets, Lau-Balagnas, Pierrefitte-Nestalas, Saint-Savin, Soulomet et Uz. Cette commission est aussi propriétaire des refuges du territoire : Marcadau, Ilhéou, Russel et Estom.
800 000 € de travaux de mise en conformité ont été réalisés au refuge du Clot : accessibilité pour les personnes à mobilité réduite, cuisine, sanitaire et sécurité liée aux risques incendie. Une somme conséquente pour un résultat assez peu visible du point de vue des randonneurs de passage. Eux auraient peut-être préféré les vieux lits superposés ainsi que les matelas et les couvertures, qui sont dignes d’un refuge peu accessible, soient remplacés.
Vallée du Marcadau, blanche et sauvage
+ 750 m / – 750 m 7h00Il fait à peine jour quand nous quittons le refuge du Clot pour remonter la vallée du Marcadau. C’est par cette vallée qu’avait débuté ma randonnée de trois jours à partir du Pont d’Espagne il y 10 ans. Etymologiquement, la dénomination de la vallée provient du col de montagne frontalier du « port du Marcadau » qui signifie « place du marché » en gascon. A cet emplacement se tenait un lieu d’échange commercial entre les habitants de Cauterets côté français et ceux de Quinon de Panticosa dans le Haut-Aragon côté espagnol. Aujourd’hui encore « les deux communautés sont liées par la gestion des pâturages du Marcadau en indivision » comme le précise la Dépêche du Midi dans un article du 21 septembre 2012.
Ce chemin qu’empruntaient les locaux a aussi été utilisé par les pèlerins se rendant à Saint-Jacques de Compostelle entre Lourdes et Jaca puis Puente la Reina sans emprunter ni la voie du Piémont ni la voie d’Arles.
Refuge du Marcadau ou Wallon
Aujourd’hui, c’est nous qui remontons cette vallée sans toutefois aller jusqu’a Port du Marcadau. Nous traversons successivement plusieurs verrous glaciaires. Au plateau de Cayan, nous chaussons les raquettes et changeons de versant après avoir franchi le gave à hauteur du pont d’Estalouqué. Le soleil n’arrive que vers 12h00 un peu avant notre arrivée au refuge du Marcadau. Il est aussi appelé refuge Wallon en hommage à Édouard Wallon, pyrénéiste français du XIX siècle.
Réveillon 2012
Nous décidons de pousser un peu plus haut, précisément à 2012 m pour finir la fin de l’année 2012 et entamons la descente par le même itinéraire jusqu’au refuge du Clot.
Le soir, le refuge est plein pour la Saint-Sylvestre. Après un début de soirée un peu tendu pour des questions de place, la soirée s’anime autour d’un bon jambon de pays cuit à la braise et de quelques bonnes bouteilles de vin. Blandine sort son accordéon. Les chants commencent dans la salle à manger et se finissent dans les chambres avec une guitare. 5, 4, 3, 2, 1… On fait pêter les bouteilles de champagne et on se souhaite une excellente année 2013. Pas belle la vie ?
Vallée de Gaube
+ 275 m / – 330 m 4h30Ce matin, tous les randonneurs traînent un peu la patte malgré un petit-déjeuner plus tardif aux alentours de 9h00. Alors forcément, on démarre la journée en douceur sans avoir de grandes ambitions.
Le Pont d’Espagne au piéton
On commence par descendre jusqu’au Pont d’Espagne situé à 1496 m à la confluence du gave du Marcadau et du gave de Gaube. Lieu de passage pour les échanges avec l’Espagne, puis lieu touristique dès le milieu du XIXème siècle par l’aristocratie, il devient plus populaire dans les années soixante avec la démocratisation des vacances. Fortement dégradé par les passages répétés des véhicules, son accès a été fermé à la fin des années 90 et un parking a été aménagé en aval.
De l’isard au bouquetin
Tranquillement, nous remontons la vallée de Gaube alors que quelques flocons tombent sur nos têtes. Nous croisons deux gardes du parc national des Pyrénées en tournée d’inspection sur la zone de Cauterets. Jean-Paul Crampe, l’un d’eux, s’est spécialisé dans la protection et la connaissance des isards sur le secteur de Cauterets qui en dénombre environ 1000. 140 animaux sont actuellement marqués pour les suivre et étudier leurs comportements et mode de vie. A ce sujet, il est impensable de manquer l’exposition de la Maison du Parc National à Cauterets face à la gare.
Le dernier bouquetin des Pyrénées est mort en janvier 2000 dans le Canyon d’Ordesa en Aragon espagnol. Ce joyau de la faune sauvage venait de s’éteindre dans les Pyrénées alors que ceux côté français n’existaient déjà plus depuis le début XXème siècle à cause d’une chasse d’exhibition omniprésente. Aujourd’hui, les mœurs sont à la conservation des espèces et il est question de réintroduire le bouquetin ibérique dans les Pyrénées. Et pourquoi pas dès 2013 ? « Ce projet n’attend plus que la signature d’un accord franco-espagnol, actuellement en cours de négociation » comme le précise le n°32 du journal Empreintes du Parc National des Pyrénées.
Lac des Huats, reliquats glaciaires
En douceur sous le tapis forestier, nous rejoignons le lac des Huats où nous chaussons les raquettes et poursuivons notre progression vers le lac de Gaube.
Situé au nord d’une vaste tourbière, le lac des Huats est un lac de taille modeste, reliquat d’un grand lac plus ancien creusé par les glaciers. Ceux-ci en se retirant il y a 20 000 ans ont marqué la vallée et de nombreux polis glaciaires sur les roches granitiques moutonnées. Le travail d’érosion a créé de vastes cuvettes remplies par la fonte des glaces dans un premier temps, puis comblés par les particules minérales et organiques, substrat idéal pour la croissance de la sphaigne dans ces zones marécageuses.
Quant à l’étymologie, d’aucun affirment que « Huats » viendrait de « Huevos » (les oeufs), faisant ainsi allusion aux oeufs de batraciens et salmonidés déposés dans les gravières paisibles lors des fraies. Même si les linguistes contemporains manifestent leur scepticisme, cela a l’avantage d’évoquer la présence de l’aquafaune et la proximité de l’Aragon et de son dialecte proche du bigourdan!
Des isards
Dans le bas des pentes du Pic de la Badète de Labassa (2647 m), nous observons une horde d’isards L’occasion pour moi d’apporter quelques différences entre l’isard des Pyrénées et le Chamois des Alpes. L’isard mâle adulte pèse environ 10 kg de moins que le chamois, ce qui lui vaut souvent les préférences des pyrénéens qui le trouve plus gracieux. Côté pelage, la robe est plus colorée chez l’isard et moins uniforme. Enfin, le crâne de l’isard « présente une connexion complète des os faciaux alors que des vides osseux nommés fontanelles sont visibles sur le crâne du chamois » comme le précise un texte de l’exposition de la Maison du Parc National à Cauterets.
Lac de Gaube
Situé à 1725 mètres, le lac de Gaube est un des joyaux naturels de la région de Cauterets. Le temps est plus que bouché quand nous y arrivons mais nous ne boudons pas notre plaisir de pique-niquer près de son rivage. D’une profondeur de 40 mètres et d’une surface de 19 hectares, il est alimenté par le gave des Oulettes de Gaube qui prend le nom de gave de Gaube à sa sortie.
Sur le retour, nouvelles observations d’isards. On a été gâté !
Sous le Cabaliros
+ 465 m / – 465 m 4h00Aujourd’hui, on change d’orientation. Cap au nord ouest de Cauterets. Nous laissons les raquettes dans la camionnette malgré la neige qui est tombé cette nuit. La randonnée étant courte pour ce dernier jour, ça devrait suffire sans les raquettes.
Petite neige deviendra grande
Le point de départ se situe au parking de la ferme Igau. On remonte une piste forestière qui ne tarde pas à être recouvert d’une fine pellicule de neige. Les branches des arbres, hêtres surtout, sont eux aussi étincelants de blanc. Plus on monte, plus la pellicule prend de l’épaisseur. On s’est écarté du sentier et on regrette d’avoir laissé les raquettes à la camionnette.
Les granges d’Espoune
On prend le cap du Tuque de la Courbe (2062 m) qui se détache devant nous. L’idée est de passer le ruisseau du Bourg Débat mais force est de constater qu’on est entrain de se mettre dans un plan assez galère. Blandine prend la décision de faire demi-tour. Le soleil tombe vite derrière le Pic de Peyre Nère (1747 m). Du coup, on descend vers les granges d’Espoune et on y pique-nique à l’abri du vent.
Ce sont des granges dites « foraines » appelées « bordes » dans le pays. Elles sont situées entre le village et l’estive et constituent avec le pré sur lequel elles sont édifiées le « germ ». Cette zone intermédiaire répond aux besoins du bétail en avant et arrière saison suivant l’arrivée et le retrait de la neige.
La pente sur laquelle elles sont construites perpendiculairement à celle-ci , est judicieusement utilisée: on accède de plain-pied au grenier à foin pour engranger les réserves. Le bétail était ainsi affouragé par des trappes pratiquées au-dessus des rateliers.
L’implantation dans le terrain impose un choix: bâtie en haut du pré, il faut y remonter le fourrage fané; bâtie en bas, il faut remonter le fumier retiré au printemps pour fertiliser la prairie.
Ces prés en pente reçoivent outre le fumier un arrosage pratiqué par débordement de l’eau canalisée dans des rigoles ou « aguères » qui courent en courbe de niveau. Le terme « espoune » signifie « pré en pente » ou « au bord du ravin » et les deux traductions trouvent ici leur justification.
Le plateau d’Espoune est desservi par une piste récente, tracée aux dimensions du quad du paysan cauterésien qui exploite encore par la fauche cette zone pastorale . L’entretien du paysage est un souci esthétique dans les secteurs de montagne touristiques ; il contribue également au maintien de la sécurité des villages situés en contrebas en maitrisant l’envahissement de la végétation. C’est dire tout l’intérêt des aides pour pérenniser l’agriculture de montagne.
Détente aux thermes
L’heure tourne, il faut déjà revenir sur Cauterets, non pas pour rentrer chez soi mais pour finir la journée à se détendre dans les bains des thermes de Cauterets. Sauna, hammam, sceau d’eau froide pour les plus courageux complètent ce moment de détente.
Allez pour finir, on part tous boire un verre dans un pub du centre-ville. Même si on n’a pas eu trop de chance avec la neige, quelle sacrée équipe et quelle accompagnatrice !
Superbes moments et des paysages toujours aussi beaux.
Informations pratiques
Comment s’y rendre ?
En train
Depuis Paris, rejoindre Lourdes en TGV ou en train de nuit, puis transfert sur Cauterets en bus
En voiture
Pour calculer votre itinéraire, utilisez l’outil de l’Office de Tourisme de Cauterets.
Niveau de marche
Randonnée facile sur sentier avec un dénivelé positif moyen compris entre 400 à 700 mètres pour des randonnées de 5 heures par jour.
Portage : affaires de la journée.
Périodes conseillées
De décembre à fin mars selon l’enneigement.
Bibliographie
- Guide du Routard Pyrénées, Gascogne
- 50 randonnées raquettes dans les Pyrénées : De la vallée d’Ossau au Val d’Aran
- 25 balades hivernales à pied ou en raquettes : Hautes Pyrénées
- Carte Top 25 1647 OT Vignemale Ossau Arrens Cauterets (1/25 000)
Plus d’infos
- Office de tourisme de Cauterets : http://www.cauterets.com
- Parc National des Pyrénées : http://www.parc-pyrenees.com
- Thermes de Cauterets : http://www.bains-rocher.fr/
Fondateur d’I-Trekkings et des blogs I-Voyages et My Wildlife, j’apprécie le rythme lent de la marche et des activités outdoor non motorisés pour découvrir des territoires montagneux et désertiques, observer la faune sauvage et rencontrer les populations locales. Je marche aussi bien seul, qu’entre amis ou avec des agences françaises ou locales. J’accompagne également des voyages photo animaliers qui associent le plaisir d’être dans la nature et l’apprentissage ou le perfectionnement de la photographie animalière.